structure de la foi
La religion, écrivit un jour l’académicien Gerthold, lie l’humanité à deux réalités distinctes et complémentaires : le Dieu et l’humanité elle-même. Le zélé qui pratique les rites sans vouer son cœur au Céleste ne peut être qualifié de croyant, tout comme l’idiot qui prête foi à un Dieu dont il est l’unique fidèle ne saura jamais n’être autre chose qu’un fou. Devant l’évidence de cette vérité, les Célésiens du royaume d’Ébène fondèrent, après le décès du premier prophète, des organisations religieuses au sein desquelles ils allaient pouvoir honorer d’une même voix le Très Haut. Or, le Céleste ayant pourvu l’Homme d’une liberté inaliénable, ces communautés, plutôt que de se réunir en une seule entité toute-puissante, campèrent leurs propres interprétations des saintes paroles et divisèrent le peuple de nos landes. Au fil des décennies, ces déchirements engendrèrent alliances, conflits et, malheureusement, guerres.
Au quatrième siècle de l’ère royale vint enfin le second Prophète, Monarque d’Ébène et fondateur de la dynastie royale actuelle. Par sa volonté, les congrégations divisées retrouvèrent l’unité sous une seule et même structure commune : la Foi céleste. Désormais, malgré les cultures diversifiées du pays, tous oeuvrent au sein d’une unique organisation aux multitudes de ramifications. Plus encore, cette organisation, sous le regard bienveillant du souverain d’Ébène et de ses représentants, veille au maintien de la justice chez les Ébénois.
Selon les décrets du concile de Porte-Sainte de 355 et sous les recommandations du conseiller spirituel royal Oliviero De Rimini, chaque comté historique (donc approximativement six ou sept par palatinat culturel) héberge un chapitre de la Foi. Au sein de chacun de ces bastions autour desquels des communautés laïques ou religieuses se développèrent au fil des décennies, trois branches d’ecclésiastiques se côtoient et collaborent afin d’assurer le respect des dogmes religieux et de la justice royale dans la région. Celles-ci sont connues sous les noms du Glaive de la Foi, de l’Inquisition céleste et de la Voix. Afin que la Couronne conserve un pouvoir sur ses propres terres, un Juge royal est personnellement attitré par le souverain d’Ébène pour décider de l’innocence ou de la culpabilité des potentiels accusés capturés par les autorités du chapitre. En somme, il n’y a guère de séparation entre la Foi et l’État : la Foi est le bras justicier de l’État tandis que l’État est le mécène de la Foi.
La Voix de la Foi est le corps législatif du culte célésien. Après des années d’études des saintes écritures, les théologiens, prêcheurs et exégètes de la Voix siègent sur les conseils d’approfondissement des dogmes et sont invités à soumettre des recommandations théologiques au souverain d’Ébène. Les suggestions soumises à la Couronne pourront amender les lois religieuses déjà existantes, ou encore en proposer de toutes nouvelles qui altéreront le visage du culte célésien. Bien que rien ne contraigne le souverain d’Ébène à accepter les propositions de la Voix, traditionnellement, il prend le temps d’étudier et de répondre à celles-ci.
Par ailleurs, il est attendu des ecclésiastiques oeuvrant au sein de cette branche de s’acquitter de l’ensemble des tâches liées à l’enseignement, au missionnariat et à l’organisation de pèlerinages. Les théologiens préservent, étudient et consolident les dogmes célésiens et les écrits du Recueil des Témoins.
Le Glaive de la Foi est le corps exécutif du célésianisme. Il est constitué de soldats, de vigilants et de paladins veillant à appliquer les lois sacrées de la Couronne. En raison de sa mission d’assurer une présence constante partout dans le royaume et d’appréhender les criminels, le Glaive est la branche habituellement la plus populeuse et armée d’un chapitre. Même si ses multiples divisions ne sauraient se comparer en ampleur et en armement aux régiments royaux, elles sont suffisantes afin d’agir en tant que forces de maintien de la paix et de support à la surveillance des routes commerciales et de pèlerinage dans les régions reculées.
Les zélotes du Glaive seront donc en charge de préserver la paix dans les communautés, de mener des enquêtes liés à des crimes laïcs et de procéder à l’arrestation et à la détention des suspects. Toutefois, les guerriers du Glaive ne sont pas autorisés à mener des enquêtes concernant les crimes religieux, ni à déterminer la culpabilité d’un suspect.
L’Inquisition céleste est le second corps exécutif de la Foi. Les inquisiteurs, paladins et bourreaux qui l’animent ont la responsabilité de s’attaquer à la criminalité religieuse, communément appelée « hérésie » ou « blasphème ». Lorsque la distinction entre les crimes laïcs et les crimes religieux est floue, il relève des théologiens de la Voix de départager la nature de chaque offense aux lois terrestres ou célestes. Néanmoins, ce processus décisionnel peut parfois provoquer des tensions entre les différentes branches de la Foi et mener à des conflits politiques entre les enquêteurs du Glaive et de l’Inquisition.
Advenant la capture d’un suspect, il reviendra bien sûr au Juge royal de mener le jugement de culpabilité, comme dans tout procès de fidèle célésien.
Le Juge royal est le représentant de la Couronne au sein d’un chapitre. Le souverain d’Ébène étant à la fois le protecteur du royaume et le guide la Foi, sa voix doit être entendue dans l’entièreté du pays lorsque sont tenus des procès et enquêtes. De ce fait, Yr nomme dans chacun des chapitres d’Ébène un porte-parole de confiance déterminant l’innocence ou la culpabilité des accusés amenés devant lui par le Glaive de la Foi ou l’Inquisition céleste.
Nul autre que ce Juge n’est en mesure d’acquitter ou de condamner un Célésien, ce qui accorde à cet individu particulier un pouvoir capital dans l’administration de la justice d’un comté ou d’une région spécifique. Pour cette raison, il n’est pas rare que le souverain, en respect des prérogatives d’un haut-noble ou d’un fidèle et influent partisan, remette ce titre à un laïc en contrôle d’un territoire. Évidemment, ce genre de mesure n’est pas sans créer de remous.