Val-de-Ciel

I.DESCRIPTION GÉNÉRALE DU VAL-DE-CIEL

Capitale : Haut-Dôme, la Main céleste

Dirigeant.e : La Princesse Éloïse Arhima et l’Assemblée des Vaux

Devise historique : “Vînt la lumière”

Inspirations : Spiritualité, dévotion, prosélytisme

Gentilé : Valécien / Valécienne


La capitale spirituelle des peuples célésiens est assurément la principauté du Val-de-Ciel. Couvrant le nord des Monts Namori, le Val-de-Ciel fut fondé par des adeptes du Roi-Prophète qui aspiraient à reconstituer l’histoire de sa venue. Au fil des expéditions dans les montagnes, des regroupements de fidèles choisirent de s’établir dans les vaux les plus hospitaliers afin de se rapprocher du Céleste. La logique était simple : se rapprocher des cieux afin de se rapprocher du dieu. C’est vers le milieu du premier siècle de l’ère royale que plusieurs communautés décidèrent d’unir leurs efforts afin d’ériger une cité spirituelle sur le plateau habitable le plus élevé des monts, “la Main céleste”. D’abord modeste, la ville -baptisée Haut-Dôme- devint avec les décennies un lieu de pèlerinage prisé par les fervents du royaume d’Ébène.

Aujourd’hui, le Val-de-Ciel est la terre de rencontre des éminences célésiennes. Même si tous soupçonnent que le sol de la principauté est riche en métaux de toutes sortes, son économie repose depuis des décennies sur le “tourisme” religieux qui s’y opère. Effectuer un pèlerinage dans les montagnes constitue, pour la plupart des Célésiens, un projet pour lequel ils économisent toute leur vie durant. Dès lors, lorsqu’ils finissent par se déplacer vers Haut-Dôme ou les Ossuaires des Hautes-Terres, les pèlerins portent avec eux les biens qui iront enrichir les coffres valéciens. C’est par la mer, grâce aux installations de Port-Céleste à l’est, ou par les vallées et plateaux montagneux, grâce aux routes transitant par Porte-Sainte, que ces fidèles réussissent à atteindre les ultimes étapes de leurs pérégrinations.

Initialement un palatinat comme les autres au sein du royaume d’Ébène, le Val-de-Ciel parvint à ressortir de la Guerre de l’Avènement lors du quatrième siècle comme l’unique marquisat du pays. Supportant la nouvelle dynastie royale de toute leur puissance, les Valéciens refusèrent d’abandonner leur autonomie lorsque le Guérisseur couronné fut élevé sur le trône d’Yr. Un compromis fut alors formulé : en échange de l’appui de la province du sud, le Roi acceptait de lui reconnaître le statut particulier de « Marche » d’Ébène. Les Valéciens pourraient dès lors préserver leur organisation politique interne sous la supervision d’un Haut-Inquisiteur royal. En échange, les armées du Val-de-Ciel seraient entièrement responsables de la protection immédiate des frontières méridionales et du mur de Théodas, imposante structure défensive construite entre le marquisat et l’ancienne république du Firmor. Ainsi, en tout respect de la légitime royauté de la dynastie d’Yr, la famille Arhima de Haut-Dôme et l’Assemblée des Vaux veilleraient à la préservation des montagnes.

Or, avec la reprise des réceptions royales yriotes en 378, un vent de centralisation politique et religieuse souffla sur le pays. À partir du palais de la Reine Adrianna, les courtisans d’Ébène multiplièrent les affronts à l’endroit du Val-de-Ciel, que ce soit niant son droit à l’autodétermination ou en injuriant ses traditions uniques. À l’été 381, le Val-de-Ciel fut donc la première région du royaume d’Ébène, avec le duché de Fel, à proclamer son indépendance complète par rapport à la Couronne d’Yr. Abandonnant son statut de marquisat -qui rappelait une forme de soumission à une autorité laïque, il adopta celui de principauté. Par ce décret, Éloïse Arhima, désormais princesse assistée de l’Assemblée des Vaux, se plaçait comme l’héritière des anciens princes et princesses d’Ébène et ne reconnaissait comme seul maître que le Céleste lui-même. Dans un désir d’éviter un éclatement de la foi, elle reconnut l’année suivante l’autorité du clergé de la foi céleste et de la Divine, même si cette reconnaissance devait demeurer sujette à controverse auprès de ses ouailles valéciennes.

Essentiellement confiné dans les Monts Namori, le Val-de-Ciel détient quelques possessions terriennes dans la région des Criffes, à la frontière entre Corrèse et le Sarrenhor, là où le fleuve de la Laurelanne se ramifie en trois affluents aux lits incertains. Anciennement sous le contrôle de la congrégation célésienne militaire de la Compagnie hospitalière, il s’agit désormais d’un point de passage quasi-obligé pour entreprendre l’ascension des montagnes. Sous le regard vigilant et pieux des religieux qui y résident toujours, nulle hérésie ne peut pénétrer le havre spirituel du Céleste.

Le peuple du commun de Val-de-Ciel semble vivre hors du temps. Loin des conflits des cours du royaume d’Ébène, il s’adonne à l’élevage au rythme des saisons, fuyant les hauteurs lors des grands froids et délaissant les pieds des montagnes en été afin d’éviter les contacts avec les “Nordiens”. Spiritualité et élévation de l’âme sont les maîtres mots des Valéciens, qui descendent des plus fervents pèlerins du début de notre ère. Si les dogmes de la foi du reste du continent tendent à évoluer au contact des nations étrangères et des progrès technologiques et philosophiques, ceux du Val-de-Ciel semblent figés dans le temps ; la pureté spirituelle héritée du Roi-Prophète ne saurait être entachée. La haute société de la principauté, quant à elle, est intimement liée aux lieux saints qui ponctuent les vaux. Tous les nobles sont conscients que leur autorité est directement assise sur la ferveur religieuse des fidèles et, pour cette raison, ils n’hésitent pas à entremêler foi et politique. Néanmoins, bien malin serait celui qui pourrait déterminer quel noble est véritablement pieux ou non.

Finalement, sur le plan vestimentaire, les Valéciens optent le plus souvent pour des toges amples ou des manteaux longs. Les couleurs du Céleste (bleu, argent et rouge) sont les plus prisées à Haut-Dôme tandis que, dans les vaux, le confort est de la première importance, la vie dans les montagnes ne pardonnant pas à celui qui s’encombre d’apparats futiles. Gardiens des monts sacrés, les Valéciens oscillent ainsi entre les vêtements amples adaptés aux célébrations religieuses et les uniformes militaire.

II.COMTÉ DE HAUT-DÔME

“Dès l’instant où le pied de notre Roi foula les rives de l’île d’Yr, je reçus ma vocation et pris la route menant vers les lointaines montagnes Namori. Toute ma vie durant, j’usai du temps qui m’était imparti afin d’y élever un monument à l’honneur du Dieu, une cité sainte comme nul n’en avait contemplée jusqu’alors. Sur la Main céleste, j’érigeai une tente en peau de cerf où les pèlerins purent trouver repos. La tente devint un jour campement, le campement fut ceinturé d’une palissade taillée dans les troncs de centaines de mélèzes, et, enfin, les palissades et bâtiments se doublèrent de pierres tirées des flancs des montagnes. Haut-Dôme, mon héritage, trône maintenant et à jamais au sommet des terres bénies par le Seigneur.”

Thorstein l’Oracle, Témoin et fondateur de Haut-Dôme


Juchée fièrement au sommet du plateau de la Main Céleste, la cité sainte de Haut-Dôme est l’âme et le bastion de la Foi en Ébène. Les merveilles architecturales de cette capitale inspirent aux cohortes de fidèles qui traversent quotidiennement son enceinte le sentiment d’avoir franchi le seuil de l’antichambre de l’Unique. Or, si la cité même est cause d’émerveillement, le pèlerin qui vient y quérir l’élévation et la rédemption ne doit pas oublier l’objet de sa pieuse quête, soit approfondir la compréhension de sa nature humaine par la contemplation de l’oeuvre divine ; la création qui se dévoile en aval des flancs escarpés : Ébène. Promise à être le véhicule du salut de l’humanité à la fin des temps, Haut-Dôme rivalise depuis de nombreux siècles déjà avec la Cité d’Yr afin d’obtenir la reconnaissance qui lui est due en tant que plus haut lieu de la spiritualité célésienne.

Domaine de la famille Arhima, gardienne des monts et protectrice de la Main Céleste, Haut-Dôme est le chef-lieu de la principauté céleste. Jouissant de ce statut unique, le Val-de-Ciel est garant de la protection des terres célésiennes contre les invasions au sud, en plus d’être considéré comme un territoire sacré. Autorité suprême sur les terres méridionales d’Ébène, la Princesse Éloïse Arhima est suzeraine en ses terres et règne sur le Val-de-Ciel avec le concours de la Foi et de l’Assemblée des Vaux. Devant les factions qui peuplent son territoire, il lui revient la lourde tâche de maintenir l’harmonie entre des entités trop souvent antagonistes afin d’assurer la protection du dôme des cieux.

-Géographie-

Depuis son perchoir, Haut-Dôme domine par sa prestance les quelques agglomérations dispersées entre les monts et les vaux et relevant de ses dépendances directes. En temps dégagé, on peut ainsi entendre jusqu’aux frontières de la province l’écho des cloches de ses innombrables lieux de culte. Trois routes permettent aujourd’hui l’accès à la cité sainte. La plus ancienne de celles-ci, la voie de l’Ascension, consiste en un sentier de pierres concassées et coupantes à flanc de montagne, lequel est fréquemment balayé par les vents. Jadis empruntée par Thorstein l’Oracle, fondateur du Val-de-Ciel, pour gravir la montagne, cette route est favorisée par les plus fervents pèlerins qui ne manquent pas l’occasion de se recueillir aux différentes chapelles creusées à même le roc qui en parent le chemin. Ouvrant également sur le comté de Duvel et les voies de pèlerinage, la route du Pied-Céleste fut quant à elle construite afin de répondre au nombre grandissant de pèlerins et pour faciliter l’approvisionnement de la cité sainte depuis les basses terres. Fréquemment entretenue et protégée par des paladins, son pont, sa chaussée et le faubourg fortifié du plateau de Corcolline au nord de Haut-Dôme voient quotidiennement passer nombre de visiteurs et de marchands. À ces deux voies s’ajoute la route de Valmont, ouvrant sur le versant sud de la Main Céleste. Moins fréquentée, et faisant par conséquent l’objet de moins d’entretiens que ses semblables septentrionales, la voie cahoteuse trouve à sa base le bourg de Valmont et son embranchement; point de ralliement des différentes routes du Val-de-Ciel. Ceinte de hautes murailles de pierres blanches, la cité sainte se divise en trois districts, soit les quartiers de la foi, les quartiers princiers et les quartiers des artisans.

Au coeur de la cité se trouvent le célestaire et ses quartiers religieux. Ces derniers, ainsi que les autres dépendances de la Foi réparties à travers Haut-Dôme, regroupent nombre de clercs et de converts oeuvrant au sein du clergé local. Merveille d’architecture de l’ère princière, le célestaire est le plus haut édifice du royaume. Sa façade de marbre blanc est régulièrement percée de vitraux historiés en ogives, lesquels sont ponctués de sculptures mettant en scène des épisodes de la vie du Roi-Prophète. S’élevant dignement vers les cieux et affrontant vaillamment les vents à l’aide de ses contreforts à arc-boutants, le monument est surmonté d’un imposant dôme azuré au sommet duquel brûle en permanence un brasier sacré. Au premier niveau, une imposante nef ornée de peintures et de statues pieuses sert quotidiennement à l’administration du culte. À cette dernière sont annexées huit chapelles de dévotion, chacune dédiée à un Témoin et ses reliques. Lieux de résidence urbaine de la Haute-Sénéchale, les étages supérieurs accueillent également le tribunal d’inquisition de la cité. Finalement, les paliers sous les combles abritent les archives héritées du Haut Pilier, la plus importante collection de documents religieux en Ébène.

Antérieurement au concile de Porte-Sainte, chaque congrégation comptait de nombreux lieux de culte dispersés dans l’enceinte de la ville, ce qui fait aujourd’hui de la Foi célésienne la plus grande propriétaire terrienne de la ville sainte. Les lieux les plus notables de son patrimoine sont les ateliers sacrés de l’Ordre de l’illumination à même le quartier des artisans, les cellules méditatives aurésiennes occupant les cavernes sous les quartiers religieux, la chapelle palatine du Haut Pilier annexée au palais, et les caserne-hôpitals de la Compagnie hospitalière à proximité des portes. À ces édifices s’ajoutent des cloîtres de communautés contemplatives, un nombre incalculable de chapelles, de même que quelques prieurés affiliés à l’Hétairie des Namori dont les frères et soeurs mendiants s’affairent à prêcher sur les nombreuses places publiques de la cité. Traditionnellement attachés aux valeurs du Haut-Pilier, les habitants des lieux accordent une grande place aux Écritures dans l’exercice de leur foi. Chaque foyer de Haut-Dôme compte son Recueil des Témoins, et ses vers sont quotidiennement récités en de nombreux endroits de la ville sainte.

Au sud du célestaire s’étendent les quartiers princiers. Là coexistent de nombreux manoirs nobles, de luxueux jardins agrémentés de fontaines, les écuries seigneuriales, ainsi que les garnisons de soldats arborant les couleurs de la famille Arhima. Surplombant cet ensemble, le palais de la Princesse est le second édifice en hauteur de la cité. Inspiré du célestaire qui lui fait face, le palais de marbre pourrait être confondu avec un lieu de culte célésien si ce n’était de ses fortifications et des étendards aux couleurs de la famille régnante. Occupant l’espace de la nef, la salle du trône est ceinte de stalles de bois finement gravées et surmontées de statues à l’effigie des suzerains Arhima, lesquelles sont destinées à accueillir les conseillers de la Princesse. Relativement sobre, cet ensemble met en valeur le siège régalien placé au sommet des marches où trônerait normalement un autel.

On trouve au nord du célestaire les quartiers des artisans. Ses habitants, depuis leurs échoppes plus modestes, vaquent quotidiennement à la fabrication d’ex-votos, de statuettes pieuses, d’images dévotes, de livres saints et d’autres souvenirs à même d’être achetés par les pèlerins de passage dans la cité. Ces objets de dévotion trouvent acheteurs aux Halles de l’Oracle, large réseau de rues mercantiles couvertes. Attirant peu les marchands en provenance du nord, qui lui préfèrent l’accessibilité des marchés de Porte-Sainte et de Port-Céleste, l’activité économique de la capitale valécienne repose encore sur les richesses des pèlerins qui affluent entre ses murs. Néanmoins, les élevages qui parcourent les vaux ont su permettre aux artisans d’Haut-Dôme de gagner une part significative du marché de parchemin et de velin du continent.

-Histoire-

Qui pénètre dans la sainte cité de Haut-Dôme aujourd’hui aura grand peine à imaginer la tente en peau de cerf de Thorstein Arhima, de même que le bourg d’habitations modestes en rondins, qui couronnaient jadis la Main Céleste. Pourtant, c’est bien à ces débuts modestes qu’il faut attribuer l’érection de la ville sainte. D’abord un lieu de pèlerinage prisé du Prophète, le pic de la Main Céleste accueillit le bûcher du Roi en la vingt-cinquième année de son ère. Hissant avec l’aide de ses compagnons le corps du souverain jusqu’au sommet de la plus haute des montagnes, un jeune prêtre de Felbourg la Cité décida alors de ne plus jamais en descendre. De son vivant, Thorstein l’Oracle faisait déjà l’objet d’une grande dévotion pour son ascétisme, guidant les pas de gueux et de seigneurs vers sa retraite et l’élévation spirituelle du royaume. Graduellement, une communauté religieuse se forma autour de l’anachorète, puis des laïcs en quête de rapprochement avec le Céleste gagnèrent les côtés des religieux afin de les assister dans la prière. Par la ferveur, et avec le concours des donations de pèlerins, le campement devint bourg, puis le bourg devint cité. La tente en peau de cerf céda d’abord sa place à un premier beffroi, lequel fut rapidement remplacé par un chantier de taille inégalée depuis la fondation d’Yr. On ne posa la dernière pierre du célestaire de Haut-Dôme qu’en la soixante-quinzième année de l’ère royale, soit cinquante ans après le trépas de l’envoyé du Dieu, au terme de négociations serrées avec la Couronne d’Yr. La complétion du monument coïncida, non par hasard, avec le Pèlerinage du Jeune, lors duquel le prince Orcidias II et ses palatins prirent la route de Haut-Dôme afin de reconnaître au fils de Thorstein le titre de seigneur-palatin du Val-de-Ciel.

Spiritualité et élévation de l’âme sont depuis les maîtres mots des Valéciens, qui descendent des plus fervents pèlerins du début de l’ère royale. Investis par le Céleste d’une mission sacrée à travers les visions de Thorstein l’Oracle, soit celle de préserver le véhicule du salut de l’humanité et d’assurer la pureté des monts Namori, les Valéciens et les habitants de sa capitale semblent vivre en dehors du temps. Privilégiant leurs devoirs pieux aux querelles temporelles qui opposent les hommes, l’histoire ébènoise ne compte que de rares exemples d’implication du Val-de-Ciel dans les guerres qui ont déchiré le royaume sous l’ère princière. De même, les conflits armés entre les seigneurs valéciens ont été historiquement fortement réprimés par la populace et les Arhima. De tels affrontements mettant en péril l’intégrité du palatinat, et par conséquent la capacité de ce dernier à être le refuge des pieux au moment de l’Ascension, les seigneurs des monts et des vaux leur préfèrent la tenue de tournois pour régler leurs différends. La grande lice de Valmont, au pied de la Main Céleste, accueille depuis le premier siècle de l’ère royale les seigneurs plaignants qui viennent s’affronter, en duel ou en équipe, sous le regard du Céleste et de la famille régnante.

Bien que les bannières laïques du Val-ce-Ciel aient formé le gros des forces du Monarque lors de la Guerre de l’Avènement, la famille Arhima choisit d’entretenir la neutralité de Haut-Dôme avec l’aide de la Compagnie hospitalière, garantissant par le fait même un refuge à tous les Célésiens à travers la tourmente. D’un effort commun, la palatine Féori Arhima et la sénéchale Éloïse des Martial veillèrent à la protection du bastion de la Foi et oeuvrèrent depuis ses murs à faire la promotion du Témoignage de l’Unité dans le royaume. Laissé incomplet par Childéric des Martial à la suite de la disparition de ce dernier lors de l’incendie de son cloître, le Témoignage trouva rapidement écho auprès des Valéciens. Il prit ensuite racine dans le coeur des pèlerins qui portèrent sa parole jusqu’aux confins du royaume grâce au soutien de quatre des cinq congrégations et avec le concours de seigneurs affiliés à chacun des belligérants. À Haut-Dôme, il obtint la sanction de l’Oratrice Alianne Branderband qui l’intégra au culte avant même son inclusion officielle dans le Recueil des Témoins. Obtenant le manuscrit original de sa cousine après avoir pris ses voeux de paladin, Altara Chilikov apporta les deux chapitres manquant au Témoignage de son père en 343.

Affirmant pouvoir servir le Monarque tout en honorant ses traditions, le Val-de-Ciel se vit reconnaître sa particularité par rapport à la Couronne à l’issue des affrontements entre royalistes et républicains. Ne pouvant, selon la charte de Gué-du-Roi, reconnaître la présence d’une famille palatine valécienne, le Monarque entama des négociations avec une Féori Arhima vieillissante pour définir ce qui deviendrait le Marquisat Céleste. Chargé de la protection des frontières méridionales du royaume, le Val-de-Ciel fut dès lors considéré comme un territoire sacré que nul ne pouvait attaquer sans être déclaré ennemi de la Foi et du Monarque. La Marquise, autorité suprême dans toutes les matières du Marquisat, conserva le commandement d’une armée digne des bans palatins de jadis, nomma son Gardien des Cols, et régna sur ses terres avec le concours de son conseil législatif; l’Assemblée des Vaux. À l’instar du Monarque par rapport au Symposium d’Ébène, la Marquise était libre d’accepter ou de refuser les motions de l’Assemblée, mais devait vivre avec les conséquences de ses choix le cas échéant. Sauf exception, la Marquise ne pouvait par ailleurs pas proposer de nouvelles motions, ce qui l’obligeait à maintenir ses relations avec ses vassaux. Nul ne remettant plus en doute la présence sacrée d’un Arhima à la tête du Val-de-Ciel, c’est donc entre ces vassaux eux-mêmes que se jouaient les intrigues politiques.

Cet équilibre précaire entre les pouvoirs d’Yr et de Haut-Dôme subsista relativement harmonieusement jusqu’à la mort du Monarque en 369. Rendant son dernier souffle à Haut-Dôme -signe de la proximité entre les Valéciens et le souverain- il céda à sa fille, Adrianna, le trône d’Ébène. Ne jouissant pas de l’aura martiale et autoritaire de son père, le nouvelle reine adopta une politique non-interventionniste visant à préserver son statut de divinité parmi ses mortels sujets. Le vide laissé par cette posture fut prestement accaparé par ses propres courtisans aux tendances centralisatrices et absolutistes. En trois années à peine, entre 378 et 381, des décennies d’équilibre des pouvoirs entre les nord et le sud furent balayées du revers de la main : assassinat de l’ambassadeur valécien à Yr, inquisitions yriotes à Porte-Sainte, arrestations arbitraires de ressortissants valéciens, absence de reconnaissance des politiques intérieures du marquisat, refus de redonner le bouclier sacré de Galvin antérieurement sous contrôle du clergé de Porte-Sainte, etc. Au printemps 381, Haut-Dôme interdit officiellement l’accès à son territoire aux membres du chapitre de la Foi d’Yr et à l’armée religieuse de la Rex Hasta, dont faisait partie l’Intendant du Siège des Témoins Conrad de Jussac. 

Simultanément, dans une déclaration fracassante prononcée en plein soulèvement d’Yr, l’ambassadeur felbourgeois à Yr, Siegbald Cuthburg, décréta la sécession du Duché de Fel et invita les seigneurs ébènois à se libérer du joug des conspirateurs d’Yr manipulant l’esprit de la Très Divine Adrianna. Dans un même élan, il annonça un mariage entre la soeur du duc de Fel, Adélisa (ou Adé) Aerann et la Valécienne Judith de Relmont, membre de la prestigieuse et influente famille de Relmont de Fondebleau. Le Val-de-Ciel et le Duché de Fel, désormais liés, confirmaient par cette alliance la rupture entre le nord et le sud. Reprenant le flambeau d’une Reine contestée, ils offraient une alternative politique et militaire aux provinces d’Ébène. La Couronne d’Yr, affaiblie par des années de guerres et de scandales, ne pouvait étouffer ces voix. 

Dans un acte politique symbolique, l’Assemblée des Vaux et la Marquise du moment, Éloïse Arhima, abandonnèrent la nomenclature de “Marquisat du Val-de-Ciel” et lui préférèrent celle traditionnellement adoptée par le royaume d’Ébène après la mort du Roi-Prophète au début de l’ère royale : la principauté. La Princesse Arhima n’était pas qu’une duchesse ou une marquise parmi tant d’autres, mais l’héritière spirituelle du Roi-Prophète et gardienne des montagnes sacrées. Pendant un an, les ponts diplomatiques comme religieux entre Yr et Haut-Dôme furent complètement coupés, Ce n’est qu’à l’automne 382, à l’invitation de la Couronne d’Yr, que la Haute-Sénéchale Altara Chilikov participa au Concile d’Adrianna et joua un rôle central dans la reprise des pourparlers entre les deux régions. Voyant que l’ensemble des peuples célésiens se ralliaient les uns après les autres aux propositions de la Divine Adrianna, et souhaitant préserver son influence spirituelle sur les fidèles, la Princesse Arhima se résigna à accepter la création du clergé de la Foi et la suprématie d’Adrianna en tant que voix du Céleste. Le Val-de-Ciel fut toutefois la dernière région célésienne à se plier à ces demandes, et ce uniquement au terme de tractations secrètes de longue haleine. Selon les rumeurs, Haut-Dôme obtint de la nouvelle Divine une garantie supplémentaire et inavouée publiquement ; toute décision impliquant le Val-de-Ciel serait d’abord soumise et ratifiée par la Princesse Arhima. Ce serait la Haute-Sénéchale Chilikov en personne qui veillerait aux communications entre les deux pouvoirs. 

L’accession à la noblesse demeure fort particulière dans la principauté. Les héritiers des mesnies de Val-de-Ciel sont déterminés à la fois par leur sang et par la Foi célésienne. Il est en effet du ressort de chaque famille d’obtenir l’approbation des congrégations religieuses de la localité concernée pour officialiser la succession d’un seigneur. Plus un titre sera prestigieux et englobera de territoires, plus la concertation ecclésiastique sera d’envergure. Dans le cas des comtés et de la principauté elle-même, cela entraînera la tenue de conclaves où les débats théologiques se mêleront aux intrigues politiques. Dans le cas où aucun consensus suffisant ne serait atteint, le jeune noble sera rejeté des institutions religieuses de la province et ostracisé par la haute société. En somme, le cadet, s’il démontre une intense piété dépassant celle de ses aînés, pourra hériter des titres avant ces derniers. Le sang suggère, la foi confirme.

Succédant à sa mère après sa retraite dans un cloître à un âge vénérable, la Princesse actuelle est Éloïse Arhima. Fille de Féori la Colombe et du Sarren Énosh d’Iscar, elle fut élevée avec son jumeau Éloi dans la prière et l’exercice des armes par des paladins hospitaliers. Soucieuse du bien être des indigents, elle oeuvre auprès de ces derniers et fait l’objet d’une grande popularité auprès du peuple valécien. Elle et son époux, Thomas Pure-Laine, ont trois enfants en la personne de Rosamonde (17 ans), Childéric (14 ans) et Eude (10 ans), tous élevés par la Haute-Sénéchale Altara Chilikov qui sera un jour responsable de présider le conclave de succession. Bien qu’en très bons termes avec sa soeur, Éloi Arhima du clan des Monds est rarement vu au Val-de-Ciel depuis sa participation à la bataille de Mons lors de la Guerre de l’Avènement. Ne pouvant accepter l’alliance de la Couronne avec les Aerann, qu’il jugeait responsables de la mort de son père, il combattit les forces du Monarque auprès de son cousin Émond lors de l’ultime bataille. Chevalier émérite, peu populaire auprès des seigneurs valéciens, il trouve résidence à Lys-d’Or où il aurait épousé une chevaucheuse du clan Edar.

La famille Arhima peut également s’appuyer sur la loyauté de ses familles baronniales. Subséquemment au châtiment d’Amaline de Clairval et à l’expulsion de ses insurgés cariannistes de Haut-Dôme, les espaces vacants furent comblés par des familles nobles fidèles aux préceptes de ce qui était alors la Compagnie hospitalière. Progressivement les baronnies abandonnées du comté passèrent aux mains de vieilles familles valéciennes, de Duvel et L’Estecôte, et on vit même l’implantation dans les monts de la famille des Martial. Barons de Valmont et de sa grande lice, la famille de Duvel compte parmi ses rangs certains des bretteurs les plus réputés des gestes ébènoises. Anciens suzerains de Port-Céleste, la famille L’Estecôte exerce maintenant son autorité sur les Halles de Haut-Dôme et veille au bon approvisionnement de la capitale. Quant aux des Martial, barons du faubourg de Corcolline, leurs chevaliers disciplinés sont le fléau de tout loup ou brigand osant élire domicile dans les dépendances de la ville sainte. Fidèles à la mission de la principauté, ces lignées pieuses et chevaleresques jouent aujourd’hui un rôle clé dans la protection de la ville sainte et l’administration de ses terres.

Sur le plan de la Foi, la principauté a vu l’émergence d’un nouveau courant religieux entre ses frontières depuis le conclave de Porte-Sainte. L’Hétairie des Namori, ou Compagnie namoriste, est un regroupement de clercs affirmant que les nombreux célestaires du Val-de-Ciel devraient être les chefs lieux de la Foi célésienne unie, minant par le fait même l’influence du Siège des Témoins d’Yr. Associés à une lecture radicale du Témoignage de l’Unité, ses membres se disent tournés vers le futur de la Foi célésienne, abandonnent leur identité passée au profit de leur parenté spirituelle et vivent dans la mendicité. Trouvant leurs quartiers à Haut-Dôme dans le cloître restauré où Childéric des Martial trouva la mort lors d’un incendie, les Namoristes ont une popularité non-négligeable auprès des Valéciens, et sont la cause d’un certain nombre de frictions avec les autorités de la Foi. On en sait peu sur la hiérarchie au sein du mouvement, mais un vétéran corrésien connu sous le nom du frère Roland revient fréquemment dans les rapports d’inquisition.

III.SÉNÉCHAUSSÉE DE PORTE-SAINTE

Porte d’entrée des montagnes sacrées du Val-de-Ciel, la Sénéchaussée de Porte-Sainte est le bouclier au service des fidèles, le heaume protégeant les pèlerins. Autrefois sous le commandement de la congrégation de la Compagnie hospitalière, la région est désormais la chasse-gardée de la Haute-Sénéchale Altara Chilikov. Néanmoins, ses installations combinant magnifiquement ses vocations religieuses et militaires continuent de s’acquitter de leur rôle de gardiennes des routes de pèlerinage. Des Héritiers et Vestales qui y sont entraînés aux Paladins qui en sillonnent les campagnes afin de prouver leur piété, les traditions de Porte-Sainte perdurent malgré les changements politiques instaurés par le Monarque à partir de 345 et les chamboulements de l’Aube des peuples en 382. La réputation des célestaire et temples de l’endroit est à ce point incontestable que bon nombre des Compagnons qui y forgent leur caractère deviennent des officiers armées religieuses sur tout le continent.

C’est la Haute-Sénéchale Altara Chilikov, première fille adoptée par le Monarque lui-même avant le déclenchement de la Guerre de l’Avènement, qui coordonne les activités de la Sénéchaussée à partir du domaine de Porte-Sainte. Fidèle à l’extrême envers la Divine Adrianna et la famille Arhima, elle tente tant bien que mal d’apaiser les relations entre le nord et le sud afin de préserver l’unité de la foi célésienne.

-Géographie-

**Le domaine de Porte-Sainte**

Le domaine de Porte-Sainte est le résultat de la fusion des deux anciens comtés valéciens qu’étaient le Franc-Comté et Duvel. Au moment de la reconnaissance du Val-de-Ciel comme marquisat, l’Assemblée des Vaux confirma l’union des deux seuls territoires valéciens se situant hors des monts Namori afin de les subordonner à l’autorité de Porte-Sainte. Cette union fut maintenue lorsque le marquisat devint une principauté en 381. Quatre fiefs principaux forment aujourd’hui ce territoire et sont divisés par rapport au réseau hydrique des Criffes : Franc-Comté (à l’ouest), Duvel (au centre), Arcancourt (au nord-est) et Porte-Sainte (au sud-est).

Bien que la Sénéchaussée de Porte-Sainte se situe au Val-de-Ciel, celle-ci n’est guère montagneuse. De fait, les fiefs de Franc-Comté, de Duvel et d’Arcancourt ressemblent davantage à de grandes plaines. Ce n’est qu’en voyageant vers le sud et en se rapprochant de Porte-Sainte que le relief général se fait plus montagneux et boisé. Il convient de mentionner que cette topographie particulière et l’absence de grandes forêts permirent de facilement relier les différentes villes de la région, favorisant le commerce et la circulation des pèlerins désirant se rendre à Haut-Dôme.


**Le fief de Duvel**

Duvel est l’une des rares villes du Val-de-Ciel possédant des terres fertiles. Ce bourg se situe à proximité du Lac Alphonse, ce qui lui fait profiter des alluvions ayant grandement enrichi le sol depuis des générations. Duvel devint ainsi le grenier du Val-de-Ciel et dessert toute la population des montagnes. Le ville même de Duvel fut construite de manière à laisser son centre complètement vacant afin d’y accueillir les nombreux commerçants qui se rencontrent une fois par an, lors des Grandes Foires de Duvel. Les Grandes Foires duveloises furent instaurées en 330 par la Foi pour aider la population valécienne dans les temps des guerres et permettre une période de fraternité entre tous les Célésiens. Les Paladins de la Compagnie Hospitalière étaient bien entendu présents pour assurer la protection et la communion à tous ceux et celles qui le souhaitaient. Plusieurs modestes habitations duveloises abritant des forgerons, tisserands, boulangers et autres artisans s’élevèrent alors autour de l’aire des Grandes Foires.


**Fief de Franc-Comté**

Le Franc-Comté est le plus vaste fief du domaine de Porte-Sainte. Formant autrefois un comté à lui seul, il fut annexé par les forces de la Compagnie hospitalière au début de la Guerre de l’Avènement avant d’être confirmé comme l’une des dépendances de Porte-Sainte à la reconnaissance du statut de marquisat du Val-de-Ciel. Si les plaines à l’est des Criffes sont reconnues pour leur fertilité, celles du Franc-Comté à l’ouest sont réputées pour leur humidité. Chaque printemps, la crue des innombrables rivières et ruisseaux de la région inonde de manière chaotique les terres environnantes, rendant dangereux l’établissement de hameaux et de fortifications dans le secteur. Les habitants résident donc normalement dans le bourg de Franciel, à la lisière de la forêt éponyme à l’ouest, et migrent le temps d’un été ou d’une récolte dans les plaines inondables afin d’assurer leur pitance. Pour cette raison, c’est à Franciel que la plupart des maigres investissements du Franc-Comté furent déployés. Son château, incendié par les Vors du Sarrenhor en 316, ne fut jamais reconstruit et sert encore de refuge improvisé pour les nombreux agriculteurs s’étant approprié les lieux.


**Fief d’Arcancourt**

Sur l’embouchure septentrionale du lac Alphonse se dresse une remarquable forteresse de pierres rouges dont le double mur semble toujours s’élever plus haut afin de rejoindre la cime des édifices religieux qui l’occupent. Il est communément accepté que les architectes ayant œuvré à la construction de celle-ci aient agi de concert avec les Oracles aurésiens lors de nombreuses générations afin d’en arriver à un résultat d’inspiration divine. Tel est Arcancourt, le siège temporel d’innombrables armées de la Foi -dont la légendaire Compagnie du Heaume, devenue plus tard Compagnie hospitalière- qui surplombe et contrôle les voies de pèlerinage menant à Haut-Dôme. Là, les meurtrières et les tours surmontées de toits couverts d’ardoise émaillée permettent aux rayons du soleil de réfléchir sur les combles des structures, donnant une aura presque lumineuse à l’ensemble architectural. Au milieu de tout ceci, on retrouve une tour, plus haute que toutes les autres élévations, au sommet de laquelle brûle en permanence une flamme sacrée qui veille jour et nuit sur les Compagnons et les pèlerins qui font vivre les lieux par le chant des armes et des prières. Ultime bastion des paladins qui veillent au quotidien sur les indigents du peuple célésien, Arcancourt demeure le heaume que porte l’innocent, le phare qui perce les brumes, l’astre qui émerveille l’enfant.


**Fief de Porte-Sainte**

Dernière halte avant d’entamer l’ascension de la Main Céleste, Porte-Sainte renvoie à la cité de Porte-Chêne en Corrèse, lieu d’origine du fondateur de la Compagnie du Heaume, Galvin le Fier. Le fief de Porte-Sainte se présente donc comme étant le rempart de la cité de Haut-Dôme, laquelle est appelée à être le véhicule du salut de l’humanité. Au fil des siècles et des transformations au sein de la Compagnie, le siège de l’ordre fut appelé à être déplacé au nord, à Arcancourt. Toutefois, Porte-Sainte demeura l’enclave des Paladins purs de la congrégation, dont les membres toujours aspirent à être fidèles aux préceptes originels du Heaume. En d’autres termes, depuis la fusion entre les deux congrégations religieuses qui ont fait naître la Compagnie Hospitalière, Porte-Sainte est restée l’enclave des Paladins plus stricts dans leur respect des voeux.

Occupé au début du siècle par le commandeur Childéric des Martial, le fief fut par la suite dirigé par la Paladine Ishtar Kadivel. Porte-Sainte a ainsi profité des richesses de sa nouvelle maîtresse et s’est largement développée et militarisée. Au fil des années, le fief est passé d’un simple point de passage à une étape essentielle de tout pèlerinage menant vers le sud. Tous ces développements ont fait de Porte-Sainte le centre spirituel et culturel de Duvel grâce à son temple et son Célestaire. Lorsque le commandeur de la Compagnie Hospitalière, Vladimir Girimov, prit en charge le domaine après la destitution de Childéric des Martial en 323, il initia plusieurs grands projets pour Porte-Sainte. En 326, Girimov entreprit la construction d’imposantes fortifications sur les routes menant vers la cité. Un seul chemin allait désormais permettre d’entrer dans la ville, ce qui permettait de filtrer tous les passants. L’homme souhaitait maintenir la neutralité du Val-de-Ciel et faire de ses terres un havre de paix pour tous les Ébènois qui voudraient venir s’y installer. Un total de six tours furent construites pour rappeler les six Témoignages de l’époque, et au sommet de chacune fut aménagée une petite chapelle en l’honneur du Témoin concerné.

La ville elle-même de Porte-Sainte, accolée aux montagnes au sud-est, est le point le plus élevé du fief éponyme et se dresse sur un promontoire visible sur plusieurs kilomètres. Celle-ci est construite sur plusieurs niveaux, ce qui accentue l’élévation de cette ville. Son premier niveau abrite les habitations, les commerces, les ateliers et plusieurs autres bâtiments servant à la vie quotidienne ébènoise. Au deuxième niveau se situent les bâtiments religieux, dont une halte pour accueillir les différents pèlerins en route vers Haut-Dôme. Cette halte est un lieu saint pour les pèlerins, puisqu’elle fut construite autour du genévrier sous lequel Gaspard l’Ancien rencontra le Roi-Prophète. Il s’agit là du premier lieu où le Prophète est apparu aux Ébènois.

Au coeur de Porte-Sainte, sur le point le plus élevé de la ville, se trouve un gigantesque terrain boisé laissé pratiquement intact depuis des siècles par les premiers habitants afin d’y ériger un jour un célestaire digne de la grandeur du Céleste. Jusqu’au quatrième siècle, seul le modeste Temple de Porte-Sainte pouvait historiquement y être visité. De partout autour, l’observateur ne pouvait contempler du lieu saint que la flamme perpétuellement alimentée à son sommet. Nombreux sont ceux qui tentèrent de trouver par eux-mêmes un sentier menant vers le lieu de culte enfoui dans les boisés montagneux, mais peu d’entre eux y parvinrent sans l’aide des Paladins ou des Compagnons qui y résidaient. Le bois se voulait en lui-même une représentation de l’ombre qui est si prompte à écarter les fidèles du droit chemin et de la lutte constante des zélotes religieux pour les maintenir à l’écart. Le chemin à travers la forêt doit donc se faire à l’aide d’une troupe de religieux en entonnant une série de chants religieux. Après plusieurs heures de marche, les pèlerins se trouvaient finalement au sommet de ce mont sacré. Aujourd’hui, les pèlerins sont en supplément gratifiés de la vue d’une nouvelle et majestueuse construction s’étant développée autour de l’ancien temple : le Célestaire de l’Espoir.

La construction du Célestaire de l’Espoir s’acheva le 9 mars 326, après plus de trois ans de travaux. Ce bâtiment en pierres noires et blanches (pour rappeler le combat de chaque âme entre l’Ombre et la Lumière) se trouve en plein centre du mont sacré de Porte-Sainte. Selon l’historien de Duvel Arcelot Longuépée, ce Célestaire est l’un des plus imposants de tout le royaume autant par sa taille que par son implication pour la population de Célès. Le narthex du Célestaire de l’Espoir est composé de deux immenses tours au sommet desquelles brûle un feu éternel pour commémorer la Lumière du Très-Haut et rappeler l’ancien beffroi du Temple de Porte-Sainte qu’il a remplacé. Afin d’accéder à l’intérieur de bâtiment, le fidèle doit passer par deux énormes portes sur lesquelles ont été cloués les boucliers des compagnons du Heaume et de la Compagnie Hospitalière, hommes et femmes tombés au combat afin de commémorer leur sacrifice au nom du Céleste. Effectivement, les boucliers des frères et des sœurs tombés au combat sont un rappel de la dévotion des Paladins envers leur serment de protéger les enfants du Céleste et Son message. Au-dessus de ses portes, dans le tympan, se trouve un soleil sculpté représentant la Lumière du Céleste au centre duquel est incrustée une rosace représentant une étoile à neuf branches pour les neuf palatinats d’origine, dont chaque branche porte la couleur du palatinat auquel elle fait référence. De plus, la première nef du Célestaire est composée de six travées, une pour chacun des Témoignages du Recueil des Témoins qui ont marqué l’histoire de la Compagnie Hospitalière à l’époque, à savoir les Témoignages de l’Ombre, de la Puissance, de l’Omniscience, de l’Ascension, de l’Avènement et de l’Unité écrit par l’ancien commandeur de la Compagnie Hospitalière, Childéric des Martial. Dans les deux bas-côtés de ces différentes travées se trouve un piédestal sur lequel est déposée une copie du Témoignage correspondant à celui de la travée. La lumière entre difficilement par de petits interstices sculptés dans les murs des travées, et ce, dans le but d’amener le fidèle dans un état de contemplation. La lueur des cierges et l’odeur de l’encens purifient également l’âme du fidèle, sans oublier les bienfaits des chants liturgiques. De fait, tous les fidèles du royaume d’Ébène, qu’ils soient paysans, nobles, clercs ou laïcs, peuvent venir entendre les litanies perpétuelles entonnées par les moines de Duvel en l’honneur de tous ceux qui sont morts pour le Céleste. Ils peuvent également venir y allumer une chandelle en mémoire d’un être cher.

Avant d’entrer dans la deuxième nef de ce Célestaire, beaucoup plus majestueuse que le première, un énorme jubé avec une grande ouverture fut érigé. Sur ce dernier furent, une fois de plus, cloués les boucliers des paladins tombés au combat ou ayant servi le Glaive de la Foi, puisque chaque Paladin est un des piliers d’Ébène et un serviteur du Très-Haut. Cette seconde nef est deux fois plus large et plus longue que la précédente et possède de ce fait plus de douze travées de longueur pour représenter les douze mois de l’année. Cette nef est gigantesque, puisqu’elle doit pouvoir y réunir tous les Paladins, Compagnons et autres bienfaiteurs lors des grandes messes ou lors de l’adoubement d’un nouveau Paladin. Les voûtes de chacune de ces travées furent peintes par Ishtar Kadivel, Paladine de la Compagnie Hospitalière et Sénéchale d’Yr, lors de ses nombreux passages au Célestaire de l’Espoir. Cette dernière utilisa des couleurs vives pour que la lumière y soit accentuée. Effectivement, les claires-voies sont percées d’innombrables fenêtres laissant ainsi pénétrer la lumière et diffusant les différentes couleurs des vitraux. La passage entre la première nef qui est très sombre et celle-ci qui est plus lumineuse est un rappel que le fidèle vient de l’Ombre, mais qu’il peut aisément accepter la Lumière du Céleste. Chaque vitrail représente un événement important pour le royaume ou pour les anciennes congrégations religieuses, que ce soit la rencontre de Gaspard l’Ancien avec le Roi-Prophète sous le genévrier de Porte-Sainte, la création de la porte de Porte-Chêne, la représentation des Témoins ou le moment de la rédaction des divers Témoignages. De surcroît, sur chacun des piliers de cette nef est inscrit un passage du Témoignage de la Puissance, puisqu’il s’agit du père fondateur de la Compagnie du Heaume. Nous pouvons y retrouver plusieurs passages, comme “Plus le maillon est fort, plus la chaîne résiste. Plus la chaîne inclut de maillons, plus elle dévoile son efficacité. Tu dois être le bastion de puissance, le premier maillon d’acier qui jamais ne se tordra” ou bien “Tout enfant du Céleste porte sa grâce. Toute grâce, si elle est nourrie d’idéaux, de principes et de vertus, s’épanouira en une puissance fabuleuse bénédiction du Dieu”. Sur l’autel principal de ce Célestaire sont inscrits en lettres d’or les vœux du Paladin pour que personne ne les oublie.

Enfin, la dernière partie de ce célestaire est réservée aux clercs, aux Compagnons et aux Paladins de la Compagnie Hospitalière, puisqu’il s’agit non seulement des appartements de ces derniers, mais également des chapelles privées en l’honneur des Témoins. Dans chacune d’elles se trouve un autel contenant les reliques du Témoin. Bien qu’elles n’étaient pas dans le plan original, deux nouvelles chapelles furent construites pour pouvoir y recevoir un autel et les reliques des nouveaux Témoins. En somme, le Célestaire de l’Espoir est une représentation du royaume d’Ébène dans son ensemble, depuis son origine jusqu’à ce jour et au-delà.

Trois bâtiments furent construits près du Célestaire de l’Espoir pour répondre aux voeux faits par Vladimir Girimov en 326 : l’orphelinat Apfel, l’académie Kadivel et la bibliothèque Branderband. Chacun aura son rôle à jouer dans la formation des Paladins et venir en aide à la population du domaine et du royaume d’Ébène. Dans un premier temps, l’orphelinat Apfel, construit en l’honneur d’Emma Apfel de la Rosefranche, accueille nombre d’Héritiers et Vestales -bambins donnés à la Foi- du pays afin qu’aucun enfant du Céleste ne meurt de faim ou de soif et qu’il puisse recevoir un enseignement célésien. S’il le désire, chaque homme ou chaque femme peut devenir un ou une Paladin et recevoir l’entraînement nécessaire pour y parvenir. Cet orphelinat a été construit sur un plan carré de dix étages avec une cour intérieure pour permettre aux enfants de recevoir leur éducation, qui consiste globalement à la connaissance des valeurs célesiennes et du message du Céleste. Les enfants sont dès leur plus jeune âge amenés à réciter les lignes du Recueil des Témoins afin de pouvoir en tirer une leçon. La Haute-Sénéchale Altara Chilikov, fille de Childéric des Martial et de Mila Chilokov, fut la Première Fille du Céleste, puisqu’elle a été adoptée par le Monarque en bas âge, ce qui fit d’elle la première Vestale de la nouvelle tradition des Héritiers et des Vestales.

Dans un deuxième temps, l’académie Kadivel, bâtiment construit à la mémoire d’Ishtar Kadivel, combine les styles valécien et pyréen. Cette tour qui s’élève à plusieurs dizaines de mètres du sol sert au partage des connaissances en matière d’armement. Plusieurs académiciens et artisans s’y penchent sur de nouvelles techniques de fabrication des armes et des armures pour les rendre plus performantes, plus légères, etc. La poliorcétique est également au coeur des nouvelles techniques mises au point à Porte-Sainte. Bien que la militarisation du domaine passe par l’académie Kadivel, il n’en reste pas moins que ce bâtiment servit également à la préparation de la potion pour atténuer les symptômes de la peste sanglante au début de la Guerre de l’Avènement. Construite relativement en retrait des bâtiments principaux de Porte-Sainte, cette tour porte encore aujourd’hui un rôle d’hôpital de la cité dans ses étages inférieurs.

Finalement, la bibliothèque Branderband, bâtie en l’honneur d’Alianne Branderband, est le bâtiment le plus important dans la formation spirituelle des Paladins, puisque cette bibliothèque contient tous les Témoignages et documents relatifs à la religion au royaume d’Ébène. Sont copiés dans cette bibliothèque de forme ronde diverses copies des Témoignages. Le but de ce monument est de conserver toutes les traces de l’histoire du royaume d’Ébène, autant religieuse que militaire. C’est également à cet endroit que sont conservées les mémoires des commandeurs de la Compagnie Hospitalière et des chanoines du Célestaire de l’Espoir pour que l’on puisse garder une trace de la vie dans la région et pour montrer la volonté de conserver le Message du Céleste.

-Histoire-

L’histoire de la Sénéchaussée de Porte-Sainte est ancienne et comprend plusieurs grands évènements, que ce soit la rencontre de Gaspard l’Ancien avec le Roi-Prophète ou la Deuxième Guerre du Follet de 285. Au début de l’ère royale, le Témoin Galvin le Fier choisit la région agricole pour y installer le siège de la congrégation de la Compagnie du Heaume, l’emplacement étant un carrefour vers lequel tous les chemins de pèlerinage convergeraient un jour. Au lendemain de la mort du Roi-Prophète en l’an 25, le plateau de la Main Céleste dans les Monts Namori devint un lieu de pèlerinage fondamental de la foi célésienne, ce qui confirma les prédictions de Galvin. Dès lors, la Compagnie du Heaume, rassemblant des guerriers de la foi voués à la protection des fidèles, devint une actrice incontournable du commerce religieux dans la région. Qu’il s’agisse des quartiers généraux d’Arcancourt ou de la ville de Porte-Sainte, les pèlerins étaient les bienvenus dans les installations de la congrégation placées sous la direction des commandeurs de la Compagnie du Heaume.

Malgré la relative neutralité politique de la Compagnie du Heaume au cours des trois premiers siècles de l’ère royale, le domaine de Porte-Sainte ne fut pas épargné par les guerres. Tel fut, par exemple, le cas de la Deuxième Guerre du Follet en 285. Celle-ci avait pour objet de litige une taxe d’un follet pour tout pèlerin passant sur les terres des Vors afin de se rendre dans les Monts Namori. Les Vors, confrontés aux armées de la congrégation de la Compagnie du Heaume et d’une partie du Val-de-Ciel, menèrent alors une campagne d’attrition sanglante. C’est sur les berges de la Rivière Rouge au Sarrenhor que le meurtrier conflit se termina lors d’un duel entre Hugues des Martial -Commandeur de la Compagnie du Heaume- et Xoriavor, seigneur des Vors. Des Martial parvînt alors à occire son adversaire, mais mourut peu après de ses blessures. Néanmoins, l’issue de la guerre était scellée et les Vors, humiliés, devaient abandonner leurs prétentions sur les routes de pèlerins. Toutefois, quelques décennies plus tard, les Vors décidèrent d’attaquer sournoisement le Val-de-Ciel, plus principalement les quartiers généraux de la Compagnie du Heaume de Porte-Sainte et d’Arcancourt, causant la mort du commandeur Charles des Martial. À partir de ce moment, il fut clair pour les successeurs à la commanderie qu’il fallait à tout prix éviter de compromettre la neutralité de l’organisation.

C’est pour cette raison qu’en 322 et 323, lorsque de nombreux seigneurs valéciens se positionnèrent en faveur du Guérisseur couronné contre les Républicains d’Élémas IV, la région s’abstint d’embarquer dans la danse guerrière. Elle se concentra plutôt sur le développement de ses propres infrastructures, sur les soins aux victimes de la peste sanglante et sur la protection des voyageurs innocents. Considéré comme la porte d’entrée des montagnes sacrées et comme un bastion de la Foi, le domaine devint hors-limite pour les ambitions politiques des seigneurs. Sous le règne du commandeur Vladimir Girimov, commandeur de la Compagnie Hospitalière de 323 à 347, le comté de Duvel connut plusieurs remaniements, autant sur le plan politique, commercial que militaire. De fait, les Paladins de la Compagnie Hospitalière étaient maintenant séparés en plusieurs groupes.

Dans un premier temps, une fraction d’entre eux servait en tant que sentinelles et sillonnait les diverses routes de Duvel pour aider les citoyens du comté, réparer les voies et assurer la sécurité lors des Grandes Foires. La protection des routes par les Paladins de la Compagnie Hospitalière permit évidemment à l’économie de Duvel de fleurir et de devenir le grenier du Val-de-Ciel et des régions avoisinantes. Dans un dernier temps, un groupe d’élite fut formé parmi les Paladins les plus doués en matière de techniques guerrières et de la connaissance des Saintes Écritures. Cette troupe fut nommée “Garde d’Arcancourt” et devint rapidement le régiment du marquisat valécien responsable de la surveillance des frontières du nord. Ils furent équipés de lourdes armures, de longues lances et d’épées, et montèrent de grands et robustes chevaux de guerre caparaçonnés.

La formation des Paladins changea également sous le commandement de Girimov. La formation spirituelle se faisait désormais dans le nouveau Célestaire de Porte-Sainte, et plus précisément dans la bibliothèque Branderband, où les paladins étaient amenés à étudier quotidiennement tous les Témoignages pour en tirer des leçons de vie. La formation militaire de même que martiale, quant à elle, se déroulait à Arcancourt. Il convient de mentionner que cet entraînement se faisait simultanément par l’étude des textes et que les paladins devaient mensuellement se rendre à Arcancourt ou à Porte-Sainte pour approfondir leurs formations. À l’âge de 16 ans, tous les apprentis Paladins, homme ou femme, se devaient de réaliser un pèlerinage d’une semaine à Haut-Dôme avant de revenir à Porte-Sainte pour y être adoubés. En somme, Duvel devenait le lieu par excellence pour l’entraînement des paladins des instances religieuses et militaires d’Ébène. 

Le territoire du domaine de Porte-Sainte s’agrandit également durant le règne de Vladimir Girimov. Franc-Comté avait été très durement touché par la peste sanglante et l’ancien baron des lieux Henri Ducrâne avait délaissé ses terres pour offrir sa vie au Guérisseur couronné. Ne voulant pas que la population de Franc-Comté souffre davantage, Girimov envoya en 328 plusieurs paladins et soigneurs de la seigneurie de Bas-Cieux (sous les ordres du Paladin Carnéade d’Airain) pour remédier à la situation. L’annexion de Franc-Comté à Duvel permit d’offrir une meilleure vie au flot continuel de réfugiés fuyant les affres de la guerre. Sur recommandation de la famille palatine, l’Assemblée des Vaux signa au terme de la Guerre de l’Avènement avec la Compagnie hospitalière le Franc-Traité qui plaça l’ensemble des Criffes du Sud sous la garde des paladins.

Lorsqu’elle fut en âge de devenir Paladin, en 338, Altara Chilikov -fille de Mila Chilikov et de Childéric des Martial adoptée par le Monarque- fut envoyée à Haut-Dôme pour qu’elle puisse prendre ses voeux auprès d’Éloïse des Martial. Les années à venir ne furent pas les plus aisées pour la jeune paladine, qui dut s’adapter à une vie austère et disciplinée bien éloignée de la vie auprès des dignitaires royaux. Ce qui lui avait toujours été offert par sa proximité avec le Monarque devait désormais être mérité au terme d’efforts pieux et martiaux. D’autant que la rigueur et l’humilité exigées par rapport à sa faible constitution n’avaient d’égales que les attentes élevées de sa tutrice. Ce n’est que lorsqu’Éloïse fut convaincue de sa réelle vocation qu’elle accepta de l’adouber et de lui céder le Témoignage laissé inachevé par son père Childéric. C’est elle-même qui, par la suite, l’acheva dans l’esprit d’unité légué par l’ancien commandeur. Lors du Concile de Porte-Sainte en 355, Altara fut nommée Haute-Sénéchale du domaine de Porte-Sainte par le Monarque lui-même. Elle devait s’assurer que la foi du Val-de-Ciel (au statut politique particulier) était arrimée à la foi de la Couronne. En d’autres termes, Altara était l’intermédiaire entre le Monarque et la famille Arhima. 

Au fil des décennies, un fossé idéologique se creusa toutefois é entre l’Ébène et Porte-Sainte (et à plus forte raison le Val-de-Ciel). Les Valéciens, portés par la conviction d’habiter et de protéger le premier bastion sacré célésien, ne toléraient guère les interventions de la Couronne dans leurs affaires internes. En 379, des enquêtes du chapitre de la Foi d’Yr révélèrent même que plusieurs hauts titrés de Porte-Sainte s’adonnaient toujours à des pratiques religieuses controversées, tel l’accouplement d’Héritiers et de Vestales dans l’objectif d’engendrer des fidèles exempts de toute corruption morale. Cette secte réactionnaire portant le nom du “Renouveau” suscitait à la fois la colère des Yriotes et la sympathie des Valéciens. À la suite de rixes diplomatiques entre Yr et Haut-Dôme, la marquise Éloïse Arhima décida finalement de mener elle-même une campagne militaire et inquisitrice visant à purger Porte-Sainte de ses blasphémateurs. Une cinquantaine d’individus furent ainsi portés sur le bûcher, dont plusieurs hauts gradés du Chapitre de la Foi local. Ce n’est qu’au printemps 380 que de nouveaux Supérieurs de la Foi furent nommés sur place en les personnes de Victor Girimov (Glaive de la Foi), Fharnia Orrhen (Inquisition) et Marcus Delauney (Voix). 

La nomination de Delauney sema toutefois la controverse lorsque ce dernier imposa aux pèlerins de passage à Porte-Sainte et en quête de purification des rites impliquant des châtiments corporels. Quelques semaines plus tard, face à la réticence de ses homologues, il dut suspendre ses décrets sous peine d’être la cause du retrait des Portéens de la reconquête de la Lance d’Ardar. Par ailleurs, il accepta de confier l’un des écus sacrés de Galvin le Fier -véritable trésor de Porte-Sainte- au champion de la sainte guerre contre Ardaros, William Cotnoir. Cependant, au terme du conflit, ce dernier refusa de rendre la relique à ses propriétaires légitimes. Cet affront s’ajouta à celui de l’arrestation d’une cohorte de religieux valéciens à Havrebaie, soupçonnés d’être affiliés à l’organisation criminelle du “Verbe”. La sécession du marquisat en 381 était inévitable. 

Pour la Haute-Sénéchale Chilikov, les querelles croissantes entre Yr et Haut-Dôme étaient sources de profonds tourments. Élevée personnellement par le Monarque dans la Cité d’Yr, elle chérissait le rêve d’unité issu de la Guerre de l’Avènement. Toutefois, étant aux premières loges des offenses des absolutistes et centralisateurs yriotes à Porte-Sainte, elle ne pouvait que concéder à ses pairs du Val-de-Ciel la triste vérité : l’équilibre précaire du Monarque était brisé. En 382, la Reine Adrianna convia les représentants de l’ensemble des peuples célésiens à un concile historique visant à réorganiser le paysage politique et spirituel du royaume d’Ébène. La Princesse autoproclamée du Val-de-Ciel, Éloïse Arhima, déclina fermement l’offre et suggéra fortement à ses vassaux de l’imiter. Altara Chilikov, ne pouvant se résoudre à rejeter la main tendue de sa soeur d’adoption, se rendit seule dans la capitale et se fit médiatrice entre les intérêts du nord et du sud. Ce n’est que grâce à son intervention personnelle et à sa force de persuasion que l’Assemblée des Vaux et la Princesse Arhima acceptèrent d’intégrer le giron du clergé de la foi unifiée. C’est elle seule qui, depuis ce moment, sert d’intermédiaire entre les deux trônes. Dame Arhima n’a jamais rencontré en personne la Divine Adrianna et est toujours à couteaux tirés avec les domaines de la Divine, surtout sur la question du contrôle du Port de Bas-Cieux, autrefois propriété valécienne. 

IV.PORT ROYAL DE BAS-CIEUX

Plate-forme commerciale contrôlant l’extrémité méridionale de la Laurelanne au Val-de-Ciel, le Port royal de Bas-Cieux est sous la juridiction directe de la Couronne d’Ébène, puis de la Divine Adrianna, depuis la Guerre de l’Avènement. Malgré l’opposition des Valéciens qui y perçoivent une intrusion de la cour d’Yr sur la politique du sud, les fidèles de la Divine surent en garder le contrôle jusqu’à aujourd’hui.

-Géographie-

Le Port-Royal de Bas-Cieux est une cité autrefois marginale qui apprend tout juste à assumer un rôle central dans les jeux de pouvoir ébènois. Bien que l’agglomération soit de taille modeste, les Bascéens n’ont rien à envier à leurs voisins de Duvel, de Fondebleau et de Mordaigne en termes de prospérité. Effectivement, la présence croissante de marchands yriotes dans l’enceinte de la ville fortifiée entraîne un lot grandissant d’investissements étrangers depuis quelques décennies. D’un point de vue urbain, la cité s’articule autour de la Sénéchaussée locale et de son beffroi avoisinant. Occupant l’emplacement de l’ancien manoir d’Airain, le petit bastion fait office de résidence pour les seigneurs locaux depuis l’intégration de la cité aux dépendances de la Compagnie du Heaume il y a des siècles de cela. Ayant fait les frais du temps, le complexe militaire fut restauré par les bons soins du Bataillon sacré au lendemain de la Guerre de l’Avènement. Néanmoins, tous les efforts du monde ne pourraient palier la faille majeure du fortin, soit sa proximité avec le lieu de culte célésien. Nul seigneur valécien n’oserait élever son fortin au-delà d’un temple visant à honorer le Très Haut, si bien que la tour du beffroi surplombe encore aujourd’hui l’ensemble des défenses de la Sénéchaussée. Ainsi, comme ce fut le cas par le passé, un envahisseur n’a qu’à saisir le contrôle du beffroi pour épier les moindres faits et gestes des défenseurs, tout en faisant pleuvoir une volée de flèches sur les fortifications en contrebas.

Le bourg de Bas-Cieux est parsemé de riches demeures marchandes et d’ateliers d’artisans variés. Si la vieille-ville est marquée par la sobriété propre au Val-de-Ciel, les quartiers plus modernes font l’étalage d’une abondance exubérante. Or, ce développement n’est pas seulement le fait d’un afflux marchand. Pendant plusieurs années, Bas-Cieux fut un chantier privilégié de la Guilde royale des Artisans, personnellement mandée par le Monarque d’y refléter l’acquisition de la cité par le trône d’Yr. De nombreux projets s’y succédèrent, incluant la construction des greniers royaux du Sud, la création du grand haras royal, l’agrandissement de l’arsenal, et l’élargissement des artères commerciales. Cependant, aucun de ces projets ne rivalise en ambition avec la construction du polder de Bas-Cieux. Véritable éloge au génie des ingénieurs de Fulcieu, le polder est composé d’un agencement de digues retenant les bras de la Laurelanne dans leurs lits. Cette nouveauté permit d’abord le développement d’une industrie maraîchère dans les zones de crues traditionnelles de la cité, pour le plus grand plaisir des nouveaux exploitants. En temps de guerre, il est également possible pour les autorités d’ouvrir les digues manuellement, inondant ainsi volontairement les terres de la marche séparant Bas-Cieux du Val-de-Ciel afin de limiter les manœuvres militaires.

En marge de la cité, plus près de la frontière avec Franc-Comté, on trouve finalement la Caserne-Hôpital de Bas-Cieux. Chef-lieu de l’inquisition locale, les paladins et les pieux-médecins qui habitent les environs sont encore voués à leurs devoirs caritatifs. Le petit hameau est aujourd’hui principalement visité pour son cloître vermeil, conservé comme mémorial à l’honneur des victimes de la peste sanglante.

-Histoire-

Situé à l’effluent de la Laurelanne, à l’extrémité septentrionale des Criffes du Sud, Bas-Cieux fut de nombreux siècles durant une bourgade de moindre importance. Originellement peuplée par le clan Airain, une famille de Sarrens issus des lointains Enfants d’Arianne, la région fit office de lieu propice pour des rencontres saisonnières entre les cavaliers. Sans jamais s’établir en un lieu fixe, le clan occupa un paysage changeant jusqu’à l’Avènement du Roi-Prophète. Ce sont les nombreux pèlerinages de ce dernier, qui parcouraient fréquemment la route entre la Cité d’Yr et le sommet de la Main Céleste, qui devaient remédier à cette situation. Comme bien d’autres cités méridionales, Bas-Cieux prit racine à même le réseau de routes de pèlerinage qui se développèrent à la suite de l’unification du royaume. Bien rapidement, les Sarrens du clan Airain abandonnèrent leurs traditions nomadiques pour asseoir leur contrôle sur ces terres. C’est ainsi que Carnairain le Velu, chef du clan, devint Carian d’Airain, premier baron de Bas-Cieux. L’expansion fut d’autant plus accentuée par l’élévation du Val-de-Ciel au rang de palatinat en l’an 75 de notre ère. D’abord une simple halte sur la route de Haut-Dôme, le hameau crût pour devenir une bourgade respectable à la croisée entre les dépendances corrésiennes, sarrens, et valéciennes.

D’abord sous le contrôle des comtes de Duvel, puis sous celui des Commandeurs d’Arcancourt, Bas-Cieux fut rapidement doté de fortifications à même de contrôler la frontière valécienne. La place forte permit à la cité de Duvel de s’imposer comme une importante cité commerciale, ce qui entraîna plus d’investissements dans la bourgade du nord. Déjà établie par Galvin le Fier à Porte-Sainte, la Compagnie du Heaume prit également pied dans la ville par la création d’un premier chapitre. La vocation de Bas-Cieux semblait alors déterminée : la cité assumerait en temps de paix la protection des voies de pèlerinage et de commerce au nord du Val-de-Ciel, puis elle servirait de point de lancement pour des manœuvres militaires en temps de guerre. Néanmoins, son éloignement par rapport aux autres possessions valéciennes avait aussi pour effet de laisser Bas-Cieux dans une position de marginalité et de vulnérabilité. Les pillages et les raids en provenance des palatinats limitrophes limitèrent conséquemment son expansion.

Marqué par la Première Guerre du Follet, le premier siècle de notre ère entraîna un renouveau pour Bas-Cieux. Inspiré par l’initiative d’Éloïse d’Ardor, le baron Guibart d’Airain finança la fondation d’un temple-hôpital pour les Oblats hospitaliers naissants. Bien plus modeste que le complexe de Haut-Givre, l’hôtel-cieux de Bas-Cieux sut néanmoins attirer bon nombre de médecins en ses murs. C’est cette fonction qui devait définir la vocation du bourg jusqu’à la Guerre de l’Avènement. Désormais un phare médical à la croisée entre trois palatinats, Bas-Cieux assumerait un rôle central pour la conduite des œuvres caritatives au sud du royaume, pour le plus grand bien des indigents et des belliqueux paladins du sud.

Le temple-hôpital fut par ailleurs mis à profit dans les efforts d’endiguement de la peste sanglante au IVe siècle de notre ère. Doté d’un cloître vermeil, l’un des nombreux établissements de quarantaine érigés par la Compagnie hospitalière sur les différentes routes du royaume, Bas-Cieux devint un sanctuaire pour les affligés du sud. Grâce au sacrifice de nombreux hospitaliers, refusant d’abandonner les pestiférés à leur sort, une première cohorte de survivants parvint à surmonter le mal qui les habitait. Ces derniers vinrent ensuite en aide à leurs sauveurs, ayant développé une résistance à la malédiction forestière. Progressivement, et au coût de nombreuses vies, les hospitaliers parvinrent à abattre le joug de l’épidémie. Le cloître de Bas-Cieux fait aujourd’hui office de mémorial aux victimes de la peste sanglante, ce qui fait du bourg un arrêt prisé des pèlerins empruntant la route de Haut-Dôme.

Fidèle à la Compagnie hospitalière, Bas-Cieux se retira des affrontements au déclenchement de la Guerre de l’Avènement. Aux yeux des paladins et des pieux-médecins, Haut-Dôme se devait d’être gardée des combats en tant que véhicule du salut de l’humanité, et il était primordial que les voies de pèlerinages demeurent accessibles aux Célésiens de toute allégeance temporelle. La sénéchaussée de Duvel devint alors un refuge pour les indigents de tout acabit. Tout comme les autres dépendances de la congrégation, Bas-Cieux employa ces années pour veiller à l’érection du Célestaire de l’Espoir, faire la promotion du Témoignage de l’Unité, et contribuer à l’endiguement de la Peste. C’est dans cette dernière optique que les hospitaliers sous le commandement du camérier Carnéade d’Airain quittèrent Bas-Cieux pour entreprendre leurs œuvres caritatives sur les terres voisines de Franc-Comté en 328. Négligées par leur comte, Henri Ducrâne, qui avait voué son corps et son âme à la protection du Guérisseur couronné et à la prospérité de la colonie roseterroise, les terres de Franc-Comté avaient durement souffert du fléau sanglant et de mauvaises récoltes accablantes. En vue de remédier à la situation, le Commandement de la Compagnie hospitalière dépêcha bon nombre de ses effectifs septentrionaux à Franciel pour veiller à la protection et à la restructuration du comté, laissant Bas-Cieux sous le commandement du camérier Evanward DuBastion. Malgré ses effectifs réduits, le dernier porteur connu de l’écu de Galvin devait veiller à la protection des terres jusqu’à la fin des affrontements.

En 345, à la suite de la signature de la Grande Paix de Gué-du-Roi et à la reconnaissance du Val-de-Ciel comme Marquisat céleste, le Monarque surprit les seigneurs du Sud en revendiquant le contrôle direct de Bas-Cieux. Si la décision du suzerain prit le royaume de court, elle n’était pas sans fondement. En raison de son emplacement central, à la croisée entre Corrèse, le Sarrenhor et le Val-de-Ciel, en plus d’être cerné de routes fluviales et terrestres, le port apparaissait à tous comme la pierre d’assise du contrôle royal sur les territoires méridionaux. Cette décision entraîna une certaine rancune chez les seigneurs du sud, qui y virent une source d’ingérence potentielle dans leurs affaires quotidiennes. Pour cette raison, en 379, le Val-de-Ciel lança une opération militaire avec ses alliés de l’Orrindhas afin de reprendre contrôle de l’agglomération. Cependant, devant jongler avec un Protectorat divisé et des forces monarchistes massives, l’ost du sud dût abandonner ses prétentions après un siège désastreux.

Depuis, Bas-Cieux est un centre commercial prospère, vibrant en marge de l’Union commerciale du Sud et, de plus en plus, de la Banque libre d’Ébène, financière de la résistance monarchiste lors du siège de 379. Fort de nombreux investissements en provenance des puissantes familles marchandes de la cité et des campagnes d’Yr, le bourg su tirer parti de sa nouvelle condition pour croître en une cité d’envergure. On y trouve notamment les greniers royaux, mis à mal par la famine de 379, de même que le grand haras royal où sont conservés les puissants destriers de guerre de sa Majesté. Par ailleurs, les marchands de la famille Folville, spécialisés dans le commerce de pavot et d’opium, y ont installé leurs quartiers au nom du Pacte d’Agisborough, utilisant le réseau commercial du port pour distribuer leurs produits dans l’ouest du continent. Malgré cette omniprésence des marchands, Bas-Cieux est néanmoins sous le contrôle direct de la Divine par l’entremise du Bataillon sacré. À ce jour, la protection du fief relève du capitaine Gabriello de Verrizi, un vétéran salvamerois s’étant démarqué parmi la garde personnelle du prince Élémas V lors de la bataille de Mons, tandis que son administration quotidienne est officieusement laissée à Aymeric de Chambourg, un négociant élu par ses pairs.

V.COMTÉ DE FONDEBLEAU

La cité de Fondebleau est le siège du pouvoir du Légat Wilfred Pure-Laine. Héritier de la célèbre famille Pure-Laine des Gorgias, il a suivi le déménagement de l’Assemblée des Vaux à Fondebleau afin de se distancer du pouvoir des Arhima à Haut-Dôme. Wilfred est un jeune homme d’apparence soignée et élégante, mais également impulsif. Il est reconnu pour être passionné dans ses idées et peu enclin aux compromis. Au sein de l’Assemblée des Vaux -rassemblement noble valécien conseillant et épaulant la famille Arhima de Haut-Dôme, il veille à pousser ses idées en se propulsant grâce à l’appui de la petite noblesse.

Le comté est également hôte de la plus grande communauté culturelle du Val-de-Ciel. Les artistes, ménestrels et philosophes se rassemblent régulièrement dans les salons bourgeois de la cité afin d’échanger sur l’art, les sciences nouvelles et les courants de pensée émergents. Cependant, l’entièreté de ces pratiques est fortement teintée de considérations religieuses, le culte célésien ne pouvant être occulté des sphères de la vie des Valéciens. Tel est le cas, entre autres, de l’Académie médicale, relevant du prestigieux Ordre médical d’Ébène, qui a son campus sur place et s’intéresse avant tout aux maladies spirituelles. Sous l’oeil de l’Archiatre Gusness Jessen, les Docteurs -de la Foi et du Corps- supervisent les activités des visiteurs venant s’enquérir des guérisons miraculeuses du Roi-Prophète.  

Enfin, depuis l’indépendance du Val-de-Ciel et son ascension en tant que principauté, la petite région de Montboisé à l’ouest fut intégrée au comté de Fondebleau. Celle-ci est dirigée par Cyrius Silverberg, un stratège et officier ayant rejoint les rangs de l’Inquisition céleste à la fin de la Guerre de l’Avènement. La forteresse massive de l’Antre-du-Loup -son quartier-général- domine les vallées environnantes. De ses tours, les inquisiteurs surveillent la frontière entre Corrèse et le Val-de-Ciel, tout particulièrement les voyages vers une tour sombre visible au loin : le Zanaïr. Les terres environnantes au bastion servent également à nourrir la garnison des patrouilleurs du Mur de Théodas qui surveillent la frontière sud de Fort-Lefort. Ce bastion collabore étroitement avec la garnison de l’Inquisition basée à Montboisé. Cette région étant beaucoup trop éloignée du Château-des-Bassors, c’est Cyrius Silverberg, avec le financement du Légat Pure-Laine, qui entretient le fort. Les deux groupes n’hésitent d’ailleurs pas à s’entraider, que ce soit par le partage d’informations ou des opérations militaires frontalières communes.

-Géographie-

Le comté de Fondebleau s’étend de Val-du-Crâne au nord jusqu’aux Monts Namoris au sud, de Mortagne à l’est à Montboisé à l’ouest. 

Vallée consacrée aux ossuaires et aux crânes d’Henri DuCrâne, Val-du-Crâne, à l’est, n’est plus habité que par quelques Chapelains qui y accueillent les visiteurs. La majorité des habitants ayant été tués par la Peste rouge, Val-du-Crâne est un sinistre endroit. Même le soleil peine à franchir les pics des montagnes pour illuminer le fond de la vallée. Fort isolé, il s’agit aujourd’hui du seul point de surveillance hors des montagnes de Fondebleau. À plusieurs reprises, les autorités de Porte-Sainte approchèrent Fondebleau pour acquérir ce maigre territoire et consolider leurs propres frontières, mais les Légats refusèrent, clamant la tradition.

À l’ouest de là, Mortagne est le second bourg en importance du comté. Mortagne est avant tout une halte routière fermière entre Haut-Dôme et Fondebleau. Riche des nombreux voyageurs qui y circulent, elle est réputée pour son Grand Hall et la Galerie des Expositions Étranges. Ces deux lieux font souvent plusieurs ducats avec les gens en attente de départ voulant s’occuper tout en faisant un voyage dans le temps. Plusieurs trophés et reliques ornent les murs de ces deux établissements dont une griffe de Capisthéon, un texte en Firmori et une obole remontant au premier Roi-Prophète. L’histoire y est à l’honneur tout comme l’exceptionnel et l’excentrisme. Cela dit, chacune des pièces qui y est exposée est préalablement approuvée par les théologiens du clergé de la foi local qui s’assure que la forme utilisée pour sa présentation n’incite pas le visiteur au blasphème.

La plus grande partie de la population de la région réside à l’intérieur même des bourgs environnant la cité historique de Fondebleau. Les quartiers marchands, des arts et de l’Académie complètent le nouveau quartier des nobles qui accueille l’Assemblée des Vaux et le domaine des Pure-Laine. Il est dit qu’il y a toujours une fête ou une réception en cours à tout moment de la journée à Fondebleau. Après tout, les rêves ne dorment jamais.

Par-delà les vallées habitées et prospères de Fondebleau, sur la frontière occidentale de la principauté, la région de Montboisé fut pendant près de cinquante ans une comarque autonome. Au sud trône à l’extrême-ouest du Mur de Théodas le château de Fort-Lefort, dont les patrouilleurs surveillent sans relâche la frontière méridionale des terres célésiennes. C’est à partir de là que les inquisiteurs surveillent l’immensité de la forêt corrésienne. Impénétrable sauf pour les avertis et initiés, celle-ci mène plus loin à la redoutée Tour du Zanaïr, située à la limite de la zone d’influence du Val-de-Ciel. Académie du savoir occulte reconnue coupable d’hérésie par le passé, l’endroit est désormais étroitement surveillé par l’imposante et redoutable garnison inquisitoriale basée à l’Antre-du-loup. Au nord, beaucoup moins surveillé, les montagnes laissent place à la plaine de l’Orrindhas et à la Sénéchaussée de Porte-Sainte. La frontière est délimitée par Vallée-Cyan, célèbre pour son élevage d’émeus à poil long et autres animaux essentiels au ravitaillement des garnisons de l’Antre-du-Loup et de Fort-Lefort. Cependant, au printemps 384, une grave avalanche faucha une section importante de la forteresse inquisitoriale en emportant dans la mort plusieurs dizaines de ses occupants. La neige déferla jusqu’au pied des montagnes où l’on retrouva des tourelles et pierres de maçonnerie broyées par la force de la vague glacée. Nul ne put déterminer pourquoi cette catastrophe avait eu lieu, mais sa concordance avec l’activation du controversé Infuseur de Fel -un mécanisme colossal de transmutation alchimique- laissait penser qu’un lien existait entre les deux événements. 

L’ouest du comté est certainement peu peuplé, hormis dans les environs du village de Montboisé dans lequel une petite économie s’est développée pour soutenir l’Inquisition. On y note également plusieurs retraites spirituelles abritant des ermites sauvages. Les vallées boisées sont particulièrement populaires auprès des érudits et mystiques qui peuvent y mener des recherches à l’abri des troubles et intrigues affectant les peuples célésiens.

-Histoire-

Antique cité du Val-de-Ciel, Fondebleau a toujours été un pôle important pour la culture et les divertissements valéciens, ce pourquoi on l’appelle parfois, en comparaison avec Vêpre en Avhor, “L’Étoile du Sud”. Plus relâchée que la sérieuse Haut-Dôme, la ville garde néanmoins son côté religieux notamment grâce au campus de l’Académie médicale. Contrairement aux campus de Haut-Givre, Gué-du-Roi et Yr, celui de Fondebleau se concentre sur la guérison de maladies spirituelles et sortant de l’usuel. Il s’agit souvent du dernier arrêt pour les malades pour qui aucun médecin n’a pu accomplir de miracles. L’une des premières personnes soignées par l’équipe de l’Académie médicale fut d’ailleurs Altara Chilikov, la Haute-Sénéchale de Porte-Sainte. Administrée par la famille Relmont, l’Académie jouit d’une grande importance en raison des nombreuses pièces de théâtre que ses mécènes organisent, notamment à la Petite souris. Salle célèbre qui a vu les plus célèbres spectacles valéciens se produire, elle reste le point central d’un vaste réseau de salles de spectacles secondaires dans la cité.

Les Relmont fréquentent, tout comme les Pure-Laine et les autres nobles de la cité, les salons bourgeois de la ville. Lieux de rassemblement et de loisir, ils sont tous construits à l’image du plus réputé et ancien d’entre eux : “Le Noble Montagnard”. Carrefour élitiste pour grands et puissants du Val-de-Ciel, il est directement tenu par les Relmont qui y rencontrent régulièrement le Légat Wilfred Pure-Laine. On y joue aux cartes et aux oies tout en y buvant les boissons fortes les plus exotiques de la principauté. Il est dit qu’assez de ducats sont dépensés en une seule journée au Noble Montagnard que cela suffirait à nourrir tout le Val-de-Ciel pour un mois. L’influence de la famille Relmont a par ailleurs cru considérablement en 381 lorsque l’une de ses membres, Judith de Relmont, scella l’alliance idéologique entre le Duché de Fel et la Principauté valécienne en épousant la soeur du duc Aerann, l’intrépide Adélisa Aerann. C’est sur leur union que repose la bonne entente entre les deux régions indépendantes. 

Titulaire du pouvoir de l’Assemblée des Vaux, Thomas Pure-Laine, frère du Légat Wilfred, oeuvre à coordonner la noblesse des différentes régions valéciennes et faire régner la paix politique dans le Val-de-Ciel. Historiquement, ce fardeau a toujours incombé aux Pure-Laine depuis la signature de la Charte des Vaux peu avant la Guerre de l’Avènement, dont l’originale a été mis en sécurité par leurs soins. Contrairement aux autres palatinats de jadis, le Val-de-Ciel fut le seul à demeurer uni et il ne sombra jamais en guerre civile. La clé de voûte de cette harmonie fut ladite charte et le Légat Robert Pure-Laine. Seule la famille Arhima tient encore un contre-pouvoir aux volontés de l’assemblée, le représentant des Arhima pouvant invalider toute décision de son véto. Il ne peut toutefois en proposer qu’avec l’approbation de l’Assemblée, seule celle-ci légiférant. Siègent à cette Assemblée les hauts-seigneurs du Val-de-Ciel, de même que l’observateur et porte-parole officiel des Arhima. Ce titre revient présentement au frère de Wilfred, Thomas, à qui la Princesse Éloïse Arhima de Haut-Dôme est mariée. Les prises de bec entre les deux frères ne sont d’ailleurs pas rares, ceux-ci représentant des intérêts souvent en opposition.

Les habitants de Fondebleau et Mortagne sont généralement ouverts d’esprits et moins fanatiques qu’ailleurs, particulièrement comparés à ceux de Montboisé. Festifs et créatifs, ils ont de plus la chance de vivre en sécurité grâce, entre autres, à l’élimination du Cartel de Mordaigne en 323. Depuis, peu d’organisations criminelles ont osé y mettre les pieds. Il faut dire que la puissante milice de la ville et le passage fréquent des armées depuis Montboisé y sont peut-être aussi pour quelque chose. Honorant sa devise”Par la plume nous illuminerons”, la ville est un havre de paix et de savoir dans les montagnes.

Fondé par la Compagnie du Heaume il y a deux siècles, Montboisé est de son côté demeuré un lieu de grande solitude dans les Monts Namoris. Grâce à ses vallées cachées, les mystiques et amateurs de tranquillité y ont trouvé refuge, loin des aléas de la cour et des guerres du royaume. Lorsqu’en 316 un riche Corrésien aux bonnes manières se présenta au bailli local et lui proposa d’acheter l’ensemble des terres environnantes pour une centaine de ducats, ce dernier accepta sur-le-champ. Celui que les locaux appelaient “Rénald” allait rapidement devenir comte et Gardien des Cols.

Érigé en honneur des armoiries de la famille Heissen, Reinhart, ou “Rénald”, trouva grâce à Théodas Kléber les ressources nécessaires pour édifier une véritable place-forte dans l’ouest valécien. L’Antre-du-Loup resta pendant de nombreuses années le siège du pouvoir du Gardien des Cols, même après le départ de Reinhart pour la colonie de la Terre des Roses. La forteresse demeura pendant des années le centre de formation des puissants régiments valéciens. Forts de l’expérience militaire accumulée au fil des années de guerre, les vétérans perpétuèrent la tradition ainsi acquise dans leurs forces armées. Les miliciens des villes et campagnes du marquisat, puis de la principauté, furent éventuellement invités à recevoir leur formation à l’Antre-du-Loup. Ainsi, aujourd’hui, l’endroit voit constamment de nouvelles recrues y séjourner. Il est devenu la porte d’entrée la plus attrayante pour toute personne désirant servir le Val-de-Ciel par les armes.

Les inquisiteurs basés à l’Antre-du-Loup sont en général reconnus pour leur zèle extrême et leur grande rigueur, l’Inquisition y résidant ayant été chargée de surveiller le Zanaïr et les environs de Montboisé. Reinhart Heissen fut d’ailleurs le premier à menacer les mystérieux sages du Zanaïr de ses armées s’ils ne livraient pas les informations sur un hérétique qu’il traquait. L’endroit fut par la suite purgé par les armées du connétable Hadrien Visconti après la fin de la Guerre de l’Avènement, ce qui permit l’élimination stratégique de ses chercheurs blasphémateurs. Aujourd’hui, c’est le Haut-Inquisiteur Cyrius Silverberg, fils de Jean-Baptiste Néodème et d’Ana Silverberg, qui dirige Montboisé et le contingent armé qui y est stationné. Peu de critiques sont à lui faire, si ce n’est sa brutalité dans la répression des foyers hérétiques.

VI.COMTÉ D'ASCENSION

Tenu par le Primat Solécius Desvents, le comté d’Ascension est l’un des lieux les plus saints du continent. Les immenses souterrains des montagnes recèlent des trésors sacrés pour les Célésiens : les ossements de leurs êtres chers. Protégés par les Chapelains, eux-mêmes formés à Fort-Sentinelle en Terre des Roses et à Haut-Dôme, les souterrains, connus sous le simple nom des “Catacombes”, sont défendus par l’ordre armé qui surveille leurs entrées avec une discipline et un zèle redoutables. Afin d’entretenir l’immense réseau de tunnels, une donation est exigée à chaque passage de pèlerin. De plus, il peut être très dispendieux pour une famille d’acquérir une place dans l’un des plus prestigieux mausolées. Évidemment, des prix plus accessibles sont offerts aux moins nantis, certaines zones étant également réservées à des défunts anonymes.

Élevés en oeuvre d’art de la plus grande piété, les catacombes sont devenues un carrefour de pèlerinage en elles-mêmes, les fidèles venant de partout pour s’y recueillir et acquérir des reliques sacrées aux propriétés inégalées. Ainsi, les soldats en quête de protection y font souvent l’acquisition de breloques saintes, bénies par les Chapelains au nom du Céleste et réputées pour leurs nombreuses vertus. L’os d’un ancien guerrier donnera de la force, celui d’un sage de l’astuce, d’un marchand de la chance, etc. Il est fréquent de voir un noble incruster un os sacré dans sa cuirasse afin de toujours le porter au combat, ou un négociant confectionner un pendentif avec la phalange d’un autre. Plusieurs qualifient ces rites de simples superstitions, mais, comme le diront les visiteurs de ces ossuaires, il est toujours bon d’attirer l’oeil du Céleste sur soi. Les plus pauvres, incapables de se payer de tels luxes, viendront simplement toucher ces ossements afin d’en recevoir la bénédiction temporaire.

Cependant, depuis l’été 384, le chantier d’un projet colossal fait de l’ombre aux ossuaires d’Ascension. Près du Perchoir-du-Griffon, la Citadelle de l’Ascension est vouée à se dresser vers les cieux à l’approche de la fin des temps prévue par la Divine Adrianna elle-même. 

-Géographie-

Le centre du pouvoir du Primat Solécius Desvents se situe en Val-Rouge, dans l’est de l’Ascension, à la frontière des Gorgias. Cette vallée entourée de nombreuses grottes donnant accès à l’immense réseau des ossuaires est la porte d’entrée de corridors souterrains de plusieurs kilomètres dans lesquels les curieux peuvent circuler des jours durant, voire des semaines. Certaines voies de ces souterrains permettent même le passage incognito des Chapelains de la région de Montboisé à la ville de Port-Céleste, l’ensemble du Val-de-Ciel s’étendant au-dessus d’elles. Certaines rumeurs suggèrent d’ailleurs que l’origine des tunnels précéderait la fondation du royaume d’Ébène, les anciens peuples habitant les Monts Namoris les ayant aménagés pour mener des rituels intrigants. Il est fort aisé de se perdre dans ces dédales et seuls ces religieux gardiens ont réussi à en connaître la majorité des embranchements principaux. Ainsi. à plusieurs de ces sorties, notamment dans l’Ossuaire-des-Célésiens en Port-Céleste, les Chapelains veillent à encadrer et sécuriser les visiteurs et défunts des ossuaires.

Niché sur les plus hauts plateaux du Val-de-Ciel, le Perchoir-du-Griffon est le siège de la noblesse locale. Le château surveille les anciennes routes de pèlerinages et la route du Prophète traversant d’est en ouest les montagnes. Ses murs abritent également une garnison du Gardien des Cols Charles Gatereaux des Gorgias ainsi qu’un petit chapitre de la Foi. À l’été 384, l’architecte pyréen Sayyid Amezaï, engagé par la famille princière Arhima et appuyé par nombre de religieux convaincus de l’arrivée imminente de la fin des temps, débuta sur un plateau surélevé servant de pâturage le chantier de la Citadelle de l’Ascension. Avec la bénédiction de la baronne Astannia Jorthen qui espérait redorer le blason de sa maison, le constructeur jeta les fondations d’un grandiose complexe voué à accueillir les vrais Célésiens aux derniers instants de ce monde. L’édification de ce monument spirituel devait nécessiter des années de dur labeur pour être complétée. 

Au nord peut être rencontrée la ville de Haut-Roc. Encore fréquentée par certains pèlerins désirant éviter la route de Porte-Sainte, Haut-Roc est devenue le premier point de passage pour accéder aux ossuaires. Encore là, plusieurs hommes et femmes en armes peuvent y être aperçus, notamment des soldats de la principauté surveillant l’entrée en leurs terres. Un immense registre de l’ordre des Chapelains est également accessible sur place. Tous ceux désirant savoir à quelle sortie se présenter pour rencontrer une personne désignée ou se recueillir sur une dépouille spécifique y obtiennent satisfaction. Sans cette grande archive, retrouver un proche deviendrait pratiquement impossible dans les souterrains infinis.

-Histoire-

Depuis deux décennies, la croissance des infrastructures des Catacombes n’a cessé de s’accélérer. Au début du quatrième siècle, l’existence même des corridors s’étendant sous les monts Namoris était inconnue des nobles Célésiens. Développés par les hérétiques criminels Véritas, ceux-ci étaient hérités des ères anciennes précédant l’arrivée du premier Roi-Prophète. Lorsque les armées valéciennes parvinrent après des années de luttes à éradiquer les derniers partisans des Véritas dans leurs domaines, ils firent l’étonnante découverte de ces gigantesques réseaux. Abandonnés jusqu’à l’avènement du Guérisseur couronné, ils devinrent plus récemment le point de convergence de milliers de corps annuellement. Le Val-de-Ciel étant reconnu officiellement par le second Roi comme l’ultime havre de paix célésien avant la fin des temps, il devenait évident pour les mieux nantis que le meilleur endroit où reposer après leur mort était dans le roc des montagnes, sous les neiges éternelles. Ainsi, après un bûcher funéraire consumant les chairs, les ossements pouvaient être apportés dans les sommets d’Ébène. 

L’actuel Primat Solécius Desvents est un homme que certains accuseront d’être obsédé par les ducats. Son accession à la tête des Chapelains et au titre de Primat se fit rapidement et fut accompagnée par une montée des frais exigés pour les visites des reliques saintes. Homme d’origine plutôt sombre, le Primat a néanmoins démontré une grande compassion et empathie pour ceux désirant accompagner les ossements de leurs proches après le bûcher traditionnel. Il a rapidement su se faire de grands amis à la suite d’oraisons touchantes emplies de mélancolies. Deux de ses innovations se sont d’ailleurs répandues très rapidement au sein des rites funèbres : les pleureurs et le concerto des morts. Apprécié des puissantes familles nobles valéciennes, il n’y a qu’au sein de la noblesse du Perchoir-du-Griffon qu’il est contesté.

Effectivement, la famille Jorthen est la dernière titulaire de ce château de l’Ascension. Après avoir eu plusieurs propriétaires dans le dernier siècle, notamment les Vignolles et les Lévêques, les Jorthen sont revenus au pouvoir après l’intervention armée de la cité de Fondebleau en 323. Le mariage de Firianne Jorthen au Gardien des Cols William Gatereaux fit de la famille Jorthen une puissance militaire du jour au lendemain. Réputée pour sa piété et sa vigilance, Firianne a transformé l’Ascension en lieu sans brigandage et ses soldats furent surnommés les “Pieux du Perchoir” pendant la Guerre de l’Avènement. L’arrivée progressive des Chapelains à partir de 333 fut d’abord bien accueillie par la comtesse de l’Ascension. Armés et fortement armurés, ces dévots se proposèrent pour accueillir les ossements des guerriers et guerrières tombés pendant la longue guerre. L’engouement fit rapidement prendre de l’ampleur au phénomène et les Chapelains continuèrent d’arriver de Fort-Sentinelle dans la Terre des Roses. Deux décennies plus tard, un second temple des Chapelains ouvrait ses portes à Haut-Dôme, augmentant le flot de recrues en Ascension. Lorsque le marquisat fut créé, ce fut à l’éloquent primat des Chapelains, Solécius Desvents, que le Monarque et les Arhima confièrent le contrôle des Hautes Terres, au grand dam des Jorthen qui devinrent alors de simples barons.

VII.COMTÉ DES GORGIAS

Les Gorgias sont étroitement liés au Mur de Théodas. Ouvrages défensifs massifs rivalisant certainement avec le Mur de Fel, ceux-ci sont également les quartiers-généraux du Gardien des Cols, le protecteur des institutions valéciennes. Charles Gatereaux, petit-fils du défunt général William Gatereaux, est certainement le plus jeune noble à occuper cette prestigieuse fonction. Réputé stratège et ancien patrouilleur du Mur de Théodas, il connaît le Val-de-Ciel mieux que quiconque, du moins sur papier.

L’ensemble des vallées des Gorgias sert principalement de grenier pour alimenter les garnisons militaires des Valéciens. Que ce soit pour ses régiments, les patrouilleurs du Mur de Théodas ou les nombreux miliciens, les élevages gorgiens sont indispensables. De plus, afin d’équiper toute cette force armée, les forges de Chevalmont brûlent jour et nuit et fabriquent les armes et armures des soldats. La principale occupation des patrouilleurs est de surveiller la frontière sud des terres célésiennes. C’est d’ailleurs l’une des raisons pour lesquelles le Monarque autorisa après la Guerre de l’Avènement le Val-de-Ciel à commander sa propre armée, tradition qui permit à la principauté par la suite d’assurer sa propre sécurité.

-Géographie-

Le plateau des Gorgias, constitué de nombreuses vallées fertiles pour l’élevage, s’étend au nord des Monts Namoris, ceint par les comtés de l’Ascension et de Port-Céleste. En plus du comptoir de l’Union commerciale du Sud d’Ébène à Chevalmont, l’importance de la région d’un point de vue marchand est renforcée par le caravanage vers la Terre des Roses et la traversée des dangereux Grands marais firmoris.

Au sud du mur s’étend une nouvelle route sur le tout nouveau pont des Gorgias, seul point d’accès terrestre vers les anciennes contrées firmories. Celle-ci, prenant davantage la forme d’un sentier à travers les landes désolées, permet de voyager jusqu’à Ville-Sans-Ombres, au nord de la Terre des Roses. Réputée pour sa dangerosité, la “Route de Lumières” comme on l’appelle est parsemée de quelques haltes seulement. La région est rapidement devenue un havre pour les brigands des grands chemins. Sa longueur et son isolement ne facilitent pas la tâche des patrouilleurs. Toutefois, depuis 384, le nouveau Prince de la Terre des Roses indépendante, Caurdelian Chiarante, a annoncé sa volonté ferme de développer et, surtout, protéger cet axe liant le Val-de-Ciel à l’ancienne colonie du sud. Ce désir, issu des négociations entre le Lac Soleil et le chantier de construction de la Citadelle de l’Ascension, fut l’un des premiers décrets de l’élu roseterrois. 

Basés sur le Mur de Théodas, les patrouilleurs sont commandés par Antoine Lefort. Une série de fortins parsèment la fortification valécienne d’ouest en est. En son point le plus occidental se trouve Fort-Lefort dans la région de Montboisé. La surveillance de la région forestière lui étant attribuée se fait en étroite collaboration avec les autorités de l’Antre-du-Loup qui prennent également à leur charge son approvisionnement. Il s’agit d’une exception dans l’organisation du mur, explicable par son éloignement du Château-des-Bassors et par l’importance du chapitre de l’Inquisition qui siège à l’Antre-du-Loup.

En second, en Fondebleau, se trouve Fort-Kléber. Surveillant des cols désormais scellés, ce fort est certainement le plus tranquille du réseau de forteresse. Les nouveaux patrouilleurs y sont formés avec des permissions fréquentes pour aller passer du bon temps dans la grande cité de Fondebleau.

Au centre du Mur et dans le comté des Gorgias trône fièrement le Château-des-Bassors. Bien qu’elle n’ait de château que le nom, cette immense forteresse est la porte d’entrée du Val-de-Ciel. Flanquant l’immense double-porte de fer se trouvent les statues de pierre blanche du Monarque et de Théodas Kléber -son architecte- se tenant les mains. Sous cette double-poignée de mains, l’entrée est surveillée par une série de canons, beaucoup plus que dans les autres fortins et presque qu’autant qu’à Fort-sur-Mer. Dans les plateaux au nord et dans le col même, une fourmilière humaine s’est développée avec toute l’industrie nécessaire pour approvisionner le Mur et les garnisons de l’armée valécienne.

Dans le comté de l’Ascension s’élève Fort-Lamontagne. Nommé en l’honneur d’un commandant célèbre de la Compagnie du Heaume -Jean Lamontagne-, le fort a un grand nombre de patrouilleurs-vétérans à son actif. Les contacts y sont également fréquents avec l’Ordre des Chapelains qui s’occupent des nombreux ossuaires de l’Ascension.

En dernier lieu, le Mur se termine avec l’impressionnant Fort-sur-Mer dans le comté Céleste. Redoute avec des dizaines de canons, l’endroit surveille non seulement le sud, mais également la Vaste-mer. Chaque navire passant au large y est colligé et des galères spécialement fabriquées pour la garde du mur contrôlent les embarcations.

Autrement, les nombreux villages et bourgs du plateau des Gorgias sont à l’image de Chèvremont. Calmes et verdoyants, les troupeaux de chèvres y rivalisent avec les moutons et les chevaux pour les pâturages. Peu de criminels osent s’aventurer dans cette région si bien contrôlée, ceux-ci lui préférant les sauvages Grands marais firmoris ou même les steppes sarrens au nord des montagnes.

-Histoire-

Anciennement dirigés par la famille Pure-Laine, les Gorgias sont passés sous domination de la famille Gatereaux lorsque les premiers ont quitté pour Fondebleau. L’actuel Gardien des cols, Charles Gatereaux, chérit particulièrement son armée, pendant longtemps la plus puissante du royaume après celle de la Couronne elle-même. Sa puissante cavalerie, les Chevaliers de la Rose-Bleue et la Cavalerie des Vaux, est appuyée par les tirailleurs des Archers du Col ainsi que des Spadassins de Fondebleau. Finalement, le célèbre régiment de la Garde d’Arcancourt, des zélotes fortement armurés, vient compléter la force et protéger les routes du nord menant vers Haut-Dôme. Carrière de prédilection pour les nobles et jeunes aventureux aisés du Val-de-Ciel, les régiments protègent la principauté des envahisseurs du sud et préservent farouchement sa neutralité face aux potentiels conflits internes des terres célésiennes. Ce sont ces forces armées qui volèrent au secours de Corrèse à l’automne 381 et sauvèrent une partie des meubles contre les terribles Éveillés sanguinaires.

Depuis 382, ce sont ces mêmes armées qui surveillent le troisième pont des Gorgias, les deux premiers ayant été détruits par des Ébènois -dont William Gatereaux lui-même- pour des raisons de sécurité. Les régiments valéciens ont également protégé les travailleurs qui ouvrirent la route vers la Terre des Roses. Alors que la mer était le seul moyen de s’y rendre pendant presqu’un demi-siècle, ce qui semblait une bonne idée s’avéra un fiasco. Le banditisme et la menace d’attaque des peuples sauvages au sud de la colonie firent de cette route un terrain dangereux. Bien que des patrouilleurs du Mur de Théodas sortent à l’occasion sur celle-ci, ils n’ont guère de succès à y restaurer la loi. Un certain snobisme sévit dans les régiments valéciens vis-à-vis du manque de courage des pauvres âmes qui joignent les rangs des patrouilleurs. 

L’ouvrage principal du quatrième siècle, le Mur, fut construit à l’initiative de Théodas Kléber. Ingénieur et constructeur ayant fait fortune dans l’industrie de l’armement à Chevalmont, le commerçant de l’Union commerciale du sud a su trouver les appuis pour l’édification de cette formidable muraille. Son leg économique est cependant autant, sinon plus important. Sans l’industrie de Chevalmont et les élevages des Gorgias, le Mur aurait rapidement été déserté.. Les patrouilleurs ont également eu la chance d’être pris en charge par la famille Lefort. Militaires de pères en fils et de mères en filles, les Lefort ont rapidement transformé les gardes du mur en force efficace. Bien qu’ils n’aient jamais pu être encore soumis à l’épreuve du feu, aucune attaque massive par les barbares du sud n’ayant pu se rendre jusqu’à eux, les patrouilleurs surveillent tout et notent tout, jour et nuit, peu importe la saison. Les canons qui trônent au sommet de chacun des forts et du Château-des-Bassors servent non seulement à détruire l’ennemi, mais également à prévenir les vaux en cas d’attaque.

VIII.COMTÉ CÉLESTE

Le vaste port de Port-Céleste est devenu au fil des années la principale plaque tournante du commerce valécien. À sa tête se trouve le comte Titus Quantus, fils de Linérius Quantus, l’amiral de l’Estecôte. La flotte de la principauté est renforcée par les industrieux chantiers navals de la cité. Actifs depuis plus de cinquante ans, ceux-ci se sont spécialisés dans la construction de galions de à la fine pointe de la technologie maritime, gracieuseté de l’alliance entre Fel et le Val-de-Ciel. Toute cette activité n’aurait jamais été possible sans l’apport de l’Union commerciale du sud qui y tient toujours des comptoirs extrêmement fructueux. Grâce aux bois exportés de Corrèse par la corporation, les chantiers satisfont à leurs besoins quotidiens. C’est la famille Kléber, jadis basée à Chevalmont, qui coordonne ce commerce est-ouest, principalement par voie fluviale à travers le Sarrenhor.

-Géographie-

L’économie florissante du comté Céleste repose en grande partie sur ses carrières de pierre de construction, dont la plus renommée est la Carrière Blanche. Cette gigantesque excavation, nichée à flanc des Monts Namoris, est réputée pour avoir fourni la majeure partie des pierres utilisées dans la construction imposante du Mur de Théodas. À notre époque, les échos de cette réputation continuent de retentir, car les équipes des carrières, jadis dévouées à cet immense projet, sont aujourd’hui mobilisées pour servir aussi bien les besoins militaires de Corrèse contre la Horde d’Horatoth que les aspirations religieuses de Haut-Dôme.

Cette carrière n’est toutefois pas l’unique exploitation minière près de Port-Céleste. Reconnu il y a des siècles comme un site d’exploitation minière, le Domaine de l’Escouê est situé à l’extrême-sud du comté Céleste, tout juste avant les anciennes frontières de la défunte République de Firmor. Avant 384, aucune route aménagée ou même défrichée ne le traversait, les vallons, cols et falaises complexifiant horriblement les déplacements. Selon les légendes locales, les mineurs l’avaient abandonné au début de l’ère royale après que le Roi-Prophète se soit avéré incapable de réprimer le banditisme y sévissant. En 384, à la suite d’une collaboration entre le Centenier salvamerois de l’Union commerciale du Sud Cosme DeRovere et d’intérêts valéciens et roseterrois, la mine fut restaurée. On comprit alors que l’abandon de l’exploitation des filons d’argent et de quartz y reposant découlait de la présence de souterrains ayant par le passé servi de repaire à une obscure cabale hérétique. Aujourd’hui, les revenus issus de l’exploitation de la mine -soigneusement supervisée par l’Inquisition valécienne- alimentent les coffres du Val-de-Ciel et de la Terre des Roses. 

Le coeur du comté, la prospère cité de Port-Céleste, demeure le pilier de ravitaillement pour la lointaine colonie de la Terre des Roses, fournissant des denrées et des produits du continent avec une constance assurant la survie des colons depuis des années. Au cours de la dernière décennie, le commerce a connu un nouvel essor, porté par l’essor de l’industrie du miel et de la fourrure. Cependant, les temps incertains ont contraint une part substantielle du commerce à s’orienter vers l’expédition d’armes et d’armures, lesquelles chargent désormais les cales de la plupart des frégates marchandes se dirigeant vers la Terre des Roses. Ces armements sont devenus une nécessité face aux récents troubles frontaliers. Même si un lien terrestre via le Col des Bassors existe, la voie maritime demeure la principale porte d’entrée pour la colonie, une aubaine pour les habitants de Port-Céleste.

Un autre motif de fierté pour les riches habitants de Port-Céleste est le Boisé-aux-Perdrix, une région prisée pour la chasse en compagnie de l’élite. Chaque année, ce boisé accueille le plus prestigieux tournoi de chasse de la principauté, où le vainqueur est celui qui rapporte la plus imposante des proies ou, mieux encore, le célèbre cerf blanc, une créature tant convoitée qu’aperçue, mais jamais abattue.

Enfin, un lieu qui mérite d’être évoqué est l’Ossuaire-des-Célésiens, un sanctuaire ultime où reposent les dépouilles des habitants fortunés, mais également de ceux moins favorisés de la cité. Cet ossuaire est le plus imposant en dehors de l’Ascension et permet d’accéder au complexe souterrain du comté éponyme. Même si Port-Céleste compte peu de démunis, chaque individu trouve toujours sa place dans les nombreux mausolées de cette dernière demeure. Les Chapelains armés veillent sur ce lieu, garantissant le bien-être de tous, indépendamment de leur statut social.

À l’ouest de Port-Céleste, la rivière des Étoiles constitue la frontière avec les Gorgias. Les routes terrestres menant en direction de Chevalmont, Haut-Dôme et le Château-des-Bassors sont constamment animées par les échanges commerciaux. Pour traverser la rivière, un bac opère au gué du Bastion des Étoiles, gardé avec vigilance par les soldats du Gardien des Cols, garantissant ainsi la sécurité des voyageurs, sans qu’aucune attaque hostile ne soit à déplorer ces dernières années.

Au nord, Val-Gardienne se dresse en protectrice, gardant l’accès vers les Collines Grises et les territoires Vors et de Caderyn, un territoire rarement foulé par les voyageurs. Ces collines recèlent bien souvent des fanatiques de toutes sortes et de toutes tailles, faisant de cette région un endroit inhospitalier.

Au sud et au centre du comté, les majestueuses Montagnes Namoris s’étendent, leur beauté étant leur marque distinctive. Les sommets les plus élevés demeurent dissimulés derrière les nuages perpétuels, mais une route permet de traverser ces plateaux escarpés pour rejoindre le Val-du-Renouveau et le Bastion des Étoiles. Au fil des années, cette route terrestre a été développée, jalonnée de haltes et d’auberges populaires, fréquentées par les ménestrels venant de Fondebleau.

À l’est s’étend enfin la Vaste-Mer, autrefois porte d’accès à l’Union Commerciale du Sud menant à Pyrae. Aujourd’hui, cette mer est sillonnée par les convois maritimes à destination de Yr et de la Terre des Roses, tout en demeurant tristement célèbre pour les nombreux pirates d’Elfeand et de Marbelos qui y sévissent. Malgré la présence vigilante de Fort-sur-Mer sur le Mur de Théodas, le combat contre ces hors-la-loi des mers demeure perpétuel. De plus, de modestes villages de pêcheurs parsèment également cette région, parmi lesquels les Hautes-Terres et Val-Lumière, ajoutant une touche pittoresque à cette étendue sauvage.

-Histoire-

L’histoire du comté Céleste, depuis la tumultueuse Guerre de l’Avènement, a été marquée par la poigne de fer et la sagacité maritime de Titus Quantus. Cet homme austère et inflexible a consacré l’essentiel de son existence à lutter contre les fléaux des mers : les pirates. À la barre du majestueux galion Jean-Piqueur, héritage paternel remontant à plusieurs décennies, il exerce son autorité avec une justice glaciale, respectée par ses subordonnés, mais redoutée par ses détracteurs.

Au sein des murs de Port-Céleste, une dynamique communauté de bourgeois et de citoyens ordinaires s’active dans les principales industries de la cité. La pauvreté y est quasiment inexistante, et les temples dédiés au Céleste ainsi que l’Ossuaire-des-Célésiens demeurent des institutions chéries. Port-Céleste s’est érigée en un centre névralgique du commerce, alimentant la lointaine colonie de la Terre des Roses. Cette renaissance économique fut un salut bienvenu, car le commerce avec l’Union Commerciale du Sud, en direction de Pyrae, avait été sévèrement entravé par une éruption volcanique et l’arrivée des Ardarosiens. À la demande du comte Quantus, une part substantielle des revenus de la ville est réinvestie dans ses chantiers navals, qui opèrent sans relâche depuis un demi-siècle, produisant parmi les plus imposants galions de la principauté, ainsi que des frégates marchandes pour les expéditions commerciales.

Cependant, malgré les lauriers que lui tresse la population, Quantus n’est pas à l’abri des critiques, principalement émanant des éléments nobles de la cité. Certains ambitieux avancent que le comte passe trop de temps hors des murs de Port-Céleste pour gouverner efficacement. Les expéditions de chasse dans le Boisé-aux-Perdrix, outre le fait qu’elles soient prisées pour le gibier de choix qu’elles offrent, servent également de prétexte à des rassemblements de l’aristocratie, propices aux échanges informels. Naturellement, un large éventail d’opinions s’exprime librement, dans le respect des dogmes célestiens qui demeurent la colonne vertébrale de la société locale.

Le règne de Titus Quantus, empreint de fermeté et de dévouement maritime, a insufflé une nouvelle vitalité à Port-Céleste. Cette cité prospère est devenue un phare économique, une forteresse imprenable, et le cœur battant du comté de Port-Céleste.