L’ATHÉOCRATIE DU VINDERRHIN
Capitale : Forteresse de Merdren-Ovindar
Dirigeant(e) : Le roi Orovyndyr
Perception des Ébènois : Guerre froide
Inspiration : Cités-forteresses géantes au peuple athée et suprématiste
Au-delà de la mer Blanche, à mille lieues des derniers hameaux de pêcheurs ébénois, survivent dans les neiges éternelles les habitants du Vinderrhin. Selon leurs propres récits cosmologiques, leurs ancêtres seraient nés des glaces infinies des plaines nordiques, engendrés par les vents hurlants des steppes. Insensibles à la douleur et à toute forme de peur, ils auraient exterminé, il y a plusieurs millénaires de cela, les farouches géants qui dominaient la région afin de s’emparer de leurs majestueux fortins de pierres blanches. Ces impressionnantes forteresses ayant été conçues par et pour des créatures de taille inouïe, chacune d’elle jouerait aujourd’hui le rôle de cité où les familles du Vinderrhin y logeraient des milliers de leurs membres. Jusqu’à récemment, jamais ces places fortes n’avaient été conquises depuis la chute des géants, nul n’osant vraiment s’y attaquer de front ou risquer un siège prolongé dans les froids mortels de ces terres.
La situation géographique du Vinderrhin a profondément modelé le tempérament de ses habitants. L’hiver quasi perpétuel sévissant dans les steppes blanches a endurci le coeur des Hommes et a fait d’eux des êtres rationnels, calculateurs et impitoyables. Lorsque les tempêtes dévastatrices approchent, il ne convient guère de s’apitoyer sur le sort de ceux laissés dehors ou sur les malades et les indigents. L’ultime grâce pouvant être faite aux faibles, parasites aux yeux des habitants des glaces, est une mort douce dans les froids nocturnes. Peu importe les bonnes intentions, seuls les résultats importent.
Dès lors, qu’il s’agisse d’un homme, d’une femme, d’un enfant ou d’un vieillard, quiconque, tant que la force coule en ses veines, aura la chance de se faire entendre au sein du Vinderrhin. Ce concept de puissance n’est pas qu’une simple idéologie pour les fiers du Vinderrhin : c’est aussi une notion philosophique et religieuse. Habituellement, on lui donnera le nom d’Arth et ceux qui en feront la promotion -les prêtres- se surnommeront Arthéurges. L’Arth serait une énergie entièrement dissociée des dieux -le Vinderrhin nie l’existence de toute entité supérieure- animant l’humanité tout entière et la rendant apte à conquérir et dominer son environnement. L’Arth se manifesterait dans les prouesses du soldat, la création du forgeron, l’intuition du marin, etc. En cultivant ses talents et en domptant les éléments, l’Homme renforcerait l’Arth et contribuerait à rapprocher l’humanité de la perfection.
Malgré cette croyance en l’Arth, aucune noblesse de sang ne structure la politique du Vinderrhin. Dans chaque château-cité, des assemblées sont tenues lors desquelles les plus vaillants orateurs débattent des actions futures de leur communauté. Bien qu’aucun suzerain ne soit officiellement élu par ce rassemblement élitiste, l’Histoire nous a appris que des héros du peuple savent imposer leur influence et s’assurer la dévotion de leurs compatriotes. Certains de ces meneurs charismatiques useront de leur pouvoir pour développer leur forteresse tandis que d’autres se lanceront à l’assaut de leurs voisins ou, dans les cas extrêmes, des autres nations.
Du moins, ce système politique était en vigueur jusqu’au milieu du quatrième siècle. En 320, le commandeur de la Compagnie du Heaume et Témoin des Témoins, Jean Lamontagne, lança une guerre sainte contre la forteresse de Horgar-Vindrodar. Profondément enfouie au cœur des steppes glaciales du Vinderrhin, cette place-forte avait été conquise quelques années plus tôt par le félon, briseur du pacte du vin et sorcier noir Adolf Aerann de Fel. Ce n’est qu’en 322 que Jean Lamontagne fut revu. Enchaîné et mis en cage, il était brandi sur le navire de proue d’une flotte Vinderrhin venant réclamer vengeance sur le royaume d’Ébène. Au début de l’année, une horde de plusieurs dizaines de milliers de guerriers assoiffés de sang venus des quatre coins des steppes de glace déferla donc sur l’île d’Yr et dans le nord ébénois. Ce n’est que grâce au courage des vaillants et pieux défenseurs princiers que cette invasion fut repoussée. Toutefois, celle-ci coûta la vie -le croyait-on- au prince Élémas V et à des milliers de nobles Célésiens.
Si l’Ébène se réjouit de cette victoire à l’arrachée, les légions décimées qui regagnèrent le Vinderrhin rapportent avec elles une haine tenace. En quête de boucs-émissaires justifiant leur défaite, ces guerriers s’emparèrent de la forteresse côtière de Bherren-Herderdrovyn et y massacrèrent plusieurs centaines d’individus considérés comme sympathiques au royaume d’Ébène. Lors de ces tueries vengeresses, un homme se démarqua parmi les meurtriers : Ovindyr. Seigneur de la forteresse de Merdren-Ovindar, à l’ouest de Bherren-Herderdrovyn, mais toujours sur la côte de la mer blanche, ce guerrier était le descendant direct d’Ovindyr, le chef de guerre ayant mené un assaut sur le royaume d’Ébène peu après la mort du Roi-Prophète. Les habitants de Merdren-Ovindar ayant perdu beaucoup de leurs ancêtres aux mains des Ébénois dans le passé, ils entretenaient depuis des siècles une haine implacable envers les Célésiens. Ovindyr, à l’image de ses congénères, rayonna par son zèle à pourchasser les supposés traitres au Vinderrhin et rassembla autour de lui des combattants de toutes les steppes glacées. Dès lors, il put préparer son coup d’état.
Infiltrant ses sympathisants dans les imprenables cités-forteresses, il s’assura de pouvoir atteindre le cœur du pouvoir dans l’entièreté des hauts lieux du pays. Lorsqu’il fut prêt, il lança son opération et força, par la menace, la torture ou le meurtre, les seigneurs et dames du nord à lui reconnaître le titre de Roi de l’Arth. En échange, Ovindyr s’engageait à ne pas interférer dans la gestion interne des forteresses géantes ; ce qu’il désirait avant tout, c’était de contrôler les politiques étrangères du Vinderrhin. Chaque cité conserverait ses Arthéurges, ses seigneurs et ses héros, mais le Roi veillerait à la sécurité des côtes enneigées. Pendant plusieurs décennies, cet accord se maintint et, à la mort d’Ovindyr en 374, son fils, Orovindyr, lui succéda sans encombre.
L’impact d’Ovindyr et de son successeur sur les relations avec le royaume d’Ébène fut gigantesque. Encore aujourd’hui, le Vinderrhin et l’Ébène sont théoriquement en guerre ouverte. Aucune paix ou trêve ne fut signée depuis 323 et il semble peu probable que cet état de fait ne change. Orovindyr, tout comme son père, entretient une haine profonde et implacable envers les Ébénois et un mépris insondable envers la foi célésienne. De temps à autres, des marchands du nord peuvent naviguer jusqu’à l’île aux Boustrophédons, principal point de ravitaillement entre les deux pays, afin d’opérer quelques échanges avec la Marine des Mérillons, mais ceux-ci sont habituellement avares d’informations et prompts à regagner la mer une fois les ententes conclues. Néanmoins, depuis quelques années, des rumeurs filtrent parmi les marins ébénois : levée des vents du nord, réapparition des géants des glaces, changement d’attitude d’Orovindyr…Entre ragots de marins et faits établis, il est toutefois difficile de déceler la vérité dans ces histoires.