L’EMPIRE DU BOUC

Capitale : Ouran’Berron

Dirigeant(e) : L’Empereur

Perception des Ébènois : Méfiance

Inspiration : Empire centralisé du désert, empire ottoman


Les déserts du Silud s’étendent loin par-delà la mer Blanche à l’ouest. Selon d’éminents géographes ébénois, tout porterait à croire que cette contrée pourrait être atteinte par la traversée de la forêt d’Ébène. Cependant, personne depuis le Roi-Prophète n’ayant réussi l’exploit de franchir cet océan sylvestre infini, cette théorie ne put jamais être confirmée. La voie maritime demeure donc la seule option viable pour voyager jusqu’au Silud. La traversée de la mer Blanche est néanmoins extrêmement périlleuse et ne peut être envisagée que si une halte est effectuée sur l’île d’Ivoire, à mi-chemin entre nos deux nations. Jusqu’en 316, ce point de ravitaillement était sous le contrôle de la famille salvameroise Volpino, mais à la suite du départ de l’explorateur Marco Volpino au beau milieu de la Guerre des deux Couronnes, le bout de terre regagna sa neutralité. Ce n’est qu’une cinquantaine d’années plus tard que la Marine des Mérillons, avec la permission royale, investit officiellement ce modeste bout de terre afin d’y établir un nouveau comptoir commercial.

Nulle nation étrangère n’a davantage changé que le Silud au cours du dernier siècle. Auparavant divisés en une multitude de clans disparates, dispersés et en guerre perpétuelle, les Siludiens furent unifiés sous la gouverne d’un puissant mystique surnommé le Thaumaturge. Les nomades du désert vénérant les dieux animaux se firent ainsi serviteurs de mystérieux individu et de ses ambitions mégalomanes. Ce n’est qu’en 322 que le royaume d’Ébène leva le voile sur l’identité de cet homme : Ferval Aerann, devin du Zanaïr et ancien conseiller personnel du prince Élémas IV. Cette révélation se fit au moment même où celui-ci débarqua, à l’invitation de son demi-frère Aldrick Aerann, duc de Fel, au port de Felbourg la Cité en compagnie de milliers de guerriers siludiens afin d’aider le duché à maintenir son indépendance. Lors des années qui suivirent, Ferval trôna en tant que co-duc, usant de ses mystérieux et inexplicables pouvoirs de divination et de contrôle des éléments pour mener les siens à la victoire. Or, en 342, après plusieurs succès militaires éclatants, les légions siludiennes connaissent une défaite sanglante et définitive. Lorsqu’elles traversent la Laurelanne à Laure afin de prendre à revers les forces patriciennes, elles sont surprises par leur proie et décimées sauvagement. Lorsque la rumeur de la défaite du cœur des armées felbourgeoises filtre dans la Forteresse du Fils, un vent de panique s’installe. Toute une journée durant, on cherche Ferval dans la place-forte afin de s’enquérir de ses conseils, mais le co-duc demeure introuvable. C’est finalement dans le Mausolée des Dormeurs -monument de roc noir voué à l’élévation mystique qu’il avait fait construire- qu’on le retrouve. Celui-ci repose aux côtés d’une centaine de Dormeurs éternels gisant dans leurs couches. Ferval, fidèle à sa spiritualité propre, a entrepris l’ultime voyage vers la Vérité, abandonnant son enveloppe charnelle afin d’élever son esprit.

La nouvelle de la disparition du Thaumaturge et de l’anéantissement de ses troupes sur les terres ébènoises exigea plusieurs mois pour se rendre dans les déserts occidentaux. Toutefois, quand elle se répandit dans les ports, elle se propagea comme une traînée de poudre. Le récit des événements à partir de ce moment est confus pour le commun des Ébènois. Selon les quelques explorateurs ayant osé poser les pieds en ces contrées depuis 343, le Silud sombra rapidement dans l’anarchie. Privé de son tyran-divin et des impitoyables soldats du chacal réputés pour leur capacité à maintenir l’ordre, les cartels et groupes clandestins s’adonnèrent librement à leurs commerces malsains. Pendant des années, des dizaines de roitelets auto-proclamés sortirent la masse, saignèrent à blanc leurs semblables et périrent sous les poignards de leurs adversaires.

Au début des années 360, un renouveau spirituel balaya toutefois les déserts d’est en ouest. Dans chacun des clans et chacune des chaumières, hommes et femmes, vieillards et enfants, éprouvèrent des rêves similaires dans lesquels se manifestait Mak’Kel le Bouc, dieu nocturne de l’onirisme. Peu après, une troupe de pèlerins d’origine inconnue guidée par un homme arborant un crâne de bouc apparaissait dans la cité d’Ouran-Berron, prospère caravansérail du désert. Immédiatement, un flot de curieux et de désespérés convergea vers la ville afin de contempler celui qui prétendait être l’incarnation de Mak’Kel. Se nourrissant du désespoir de ces gueux, l’homme rassembla ses nouvelles ouailles et les organisa en une armée de zélotes prêts à tout pour échapper à leur situation tragique.

Rapidement, Ouran-Berron tomba aux mains de celui qui prenait désormais le nom de « L’Empereur ». Par la suite, un à un, les clans et cartels plièrent le genou devant ce souverain suscitant l’admiration des foules. Cependant, contrairement à son prédécesseur Ferval, l’Empereur ne se contenta pas d’unifier le Silud sous sa gouverne. Dès qu’il fut en position de mener ses guerres à l’extérieur de ses frontières, il dirigea ses armées vers l’ouest et le sud et soumit les clans nomades traditionnellement exclus des territoires siludiens. Depuis, l’Ébène ignore tout des ambitions expansionnistes de ce tyran. Tout ce que l’on sait, c’est que l’Empire du Bouc, comme on l’appelle, demeure extrêmement réticent à entretenir des relations avec le royaume d’Ébène, confirmant son hostilité et sa méfiance à son endroit.

Cela dit, les négociations entre les Ébènois et les Siludiens furent de tout temps ambigües. D’un côté, les déserts occidentaux regorgent de denrées rares –légales ou non- appréciées des Célésiens : soufre, épices, herbes et même poisons. Cependant, d’un autre côté, ces étrangers sont généralement reconnus comme des manipulateurs, des fraudeurs et des menteurs invétérés. À chaque occasion dont ils disposent, ces fourbes tentent de maximiser leurs profits aux dépens de toute morale, promesse ou amitié. Pour cette raison, rares sont les marchands ébénois qui osèrent historiquement établir des partenariats avec les Siludiens.