LA BANQUE LIBRE D’ÉBÈNE

Quartiers-généraux : Gué-du-Roi, Laure

Devise : « Nulle dette ne souffre »

Secteurs d’activité : Prêts, investissements, respect des contrats et mercenariat


Avant que le Sang’Noir ne ravage les terres, la métropole de Felbourg la Cité constituait l’une des principales foires marchandes des landes. La famille Aerann, dont le patriarche était duc de la région, avait un don pour la coordination et la gestion des affaires commerciales. Au fil des décennies, la maison Aerann avait accumulé une fortune considérable et pouvait, si elle le souhaitait, faire compétition aux richissimes marchands de Salvar et de Vaer (désormais Gué-du-Roi). Cependant, quand le sombre mal en provenance de la forêt d’Ébène frappa à sa porte, la famille ducale abandonna son palais de Fel et se réfugia dans les montagnes des Crocs afin d’échapper à la damnation. Au lendemain de cette infamie, le pouvoir politique de Fel fut récupéré par la famille Lobillard tandis que les immenses ressources financières des déserteurs échurent à la maison Ogrig.

Flairant la convoitise des Lobillard, le patriarche Ogrig de l’époque, Rolph dit le Hardi, acheta à bon prix une flottille de barques et de gabares et chargea celles-ci des marchandises et richesses laissées derrière par les Aerann. Moins d’une semaine plus tard, il profitait du couvert de la nuit pour remonter le cours du fleuve Augivre avec ses cargaisons. Sa destination fut la foire marchande de Vaer, à plusieurs lieues à l’Est de Fel. Malgré la fermeture des portes de la ville fluviale en temps de Sang’Noir, la famille ducale de l’époque, les Torrig, accepta exceptionnellement la venue de Rolph entre ses murs. Rapidement, celui-ci liquida quantité de ses produits et, tout en augmentant considérablement sa fortune personnelle, devînt un héros parmi le peuple affamé par le Sang’Noir.

Lorsque la Longue Année fut terminée, le marchand Ogrig usa de toute son influence auprès de la nouvelle famille régnante de Vaer -les Lacignon- afin d’obtenir le contrôle et la gestion du port fluvial de la cité. À partir de ce moment, Rolph déploya tout au long de l’Augivre et de la Laurelanne un réseau de gués accueillant ses barques marchandes. Sa stratégie était aussi simple qu’efficace : mettre à la disposition des artisans et des travailleurs ses embarcations en échange d’un pourcentage de leurs profits. Par cette méthode, il s’insinua dans l’ensemble des affaires commerciales de l’Ouest ébénois et décupla son patrimoine. Grâce aux innombrables carats qu’il accumula, il inaugura peu avant sa mort la première banque du royaume, coeur de sa puissante guilde. Jusqu’en 318, la famille Ogrig sera parmi les trois plus richissimes maisons du royaume.

En 318, Rodrick Ogrig et Gustaf Aerann, dirigeant de la Guilde des Francs-Marchands en Fel, se rencontrèrent à l’occasion de la troisième foire de Fel. Lors de ce sommet, les deux hommes convinrent que l’heure était venue de restituer à leurs propriétaires les anciens avoirs des Aerann détenus par la Banque d’Ébène depuis trois siècles. Affaiblie à la suite de nombreux scandales, Ogrig n’eut d’autre choix que d’accepter. En ce jour historique, les deux hommes signèrent la « Franche alliance », contrat dans lequel la Banque d’Ébène et la Guilde des Francs marchands fusionnaient en une seule et même entité commerciale, la Guilde franche d’Ébène. En toute magnanimité, Aldrick Aerann, palatin de Felbourg, décréta le même jour que la métropole de l’ouest devait désormais être sous la guidance de cette nouvelle entité marchande et que Gustaf Aerann, son fils, en serait le comte.

L’aventure de la Guilde franche d’Ébène dura près de cinq ans. Grâce à ses nombreux partenaires partout dans le royaume, l’organisation assimila une à une ses opposantes, devenant la plus gigantesque force commerciale de l’ère royale. Or, en 322, celle-ci s’écroula subitement sous les pressions internes et les attaques de ses adversaires de l’est. On découvrit que les fonds de la Guilde franche étaient fréquemment détournés afin de nourrir les coffres des Aerann de Fel. Plus encore, on apprit qu’elle avait, des années durant, vendu du bois aux seigneurs du Vinderrhin. Bois qu’ils utilisèrent ensuite afin de construire une flotte d’invasion du royaume. Un à un, les partenaires de la Guilde franche se dissocièrent d’elle et regagnèrent leur indépendance. La Banque d’Ébène ne fit pas exception à ce mouvement.

Incertaine de son avenir, la Banque erra pendant plusieurs mois. De Felbourg la Cité, elle déménagea à Gué-du-Roi puis à Pyrae. Finalement, à l’initiative du riche marchand Francesco Cuccia, elle revint définitivement à Gué-du-Roi. Cependant, elle prit une nouvelle orientation qui devait la définir pour les cinquante années à venir. Profitant de l’insécurité ambiante à Gué-du-Roi et de son nouveau statut de ville hôte des forces républicaines, la Banque s’associa les services de Vassili de Vignolles de la compagnie mercenaire des Mille Bannières afin de rapatrier dans la cité des milliers de reîtres en provenance des différents palatinats. Enfin, elle se lança dans la gestion du mercenariat. Mélangeant les prêts à usure, la location de légions guerrières et les investissements dans des secteurs stratégiques du royaume (ex : les écluses de la Laurelanne), la Banque devint officiellement la gestionnaire des finances de Gué-du-Roi.

La Guerre de l’Avènement nourrissant les peurs et les besoins en services de protection, la Guilde s’enrichit considérablement au cours du conflit. Plus encore, grâce à ses politiques monétaires judicieuses et son réseau de contacts, elle parvint à restructurer l’économie de Gué-du-Roi pour en assurer la survie malgré les assauts des Monarchistes. Au terme de la guerre, lorsque Gué-du-Roi fut officiellement consacrée en tant que cité franche, la guilde devint la « Banque libre d’Ébène », principal organe de financement du camp patricien. Plus encore, afin de consolider sa position dans le royaume, elle se rapprocha de la Couronne afin d’en devenir l’une de ses principales bailleuses de fonds.

Aujourd’hui, la Banque libre d’Ébène œuvre dans plusieurs domaines. En plus de s’acquitter de ses tâches traditionnelles à Gué-du-Roi -le Grand Banquier de l’organisation étant aussi le Trésorier de la ville, elle prête régulièrement de coquettes sommes à d’ambitieux Ébénois. Artisans inaugurant leur échoppe, seigneurs levant une armée, prêtres édifiant un beffroi et explorateurs en quête de nouveaux mondes figurent tous indistinctement parmi leurs clients. Même l’Union commerciale du Sud et la Marine des Mérillons, lorsqu’elles se retrouvent en manque de capitaux, font appel à la Banque pour assurer le roulement de leurs activités. Toutefois, si ces clients venaient à se montrer incapables de s’acquitter de leurs dettes, les mercenaires de Gué-du-Roi et du nord laurois veilleraient à rendre justice. Au fil des années, ces redoutables guerriers sans scrupule ont acquis une réputation peu enviable de fiers à bras prêts à tout pour obtenir leur solde. Ceux-ci veillent désormais autant à servir les intérêts de la Banque libre -qui jamais ne manque un paiement à leur endroit- que ceux des individus lésés dans le cadre d’un contrat quelconque.